23 septembre 2015
Dérivation illocutoire !
J’ai acheté La septième fonction du langage*, sur la foi d’une critique louangeuse de Busnel dans LGL, interpellée par le pitch titillant l’étudiante en linguistique que j’étais dans les années 70. J’ai ainsi stupidement dilapidé 22 € quand j’aurais pu, avec un peu de patience, satisfaire ma curiosité en dégotant ce bouquin chez un soldeur ou chez Emmaüs pour une bouchée de pain.
Ce texte pourrait se définir comme un exercice d’atelier d’écriture dont la contrainte résiderait dans la transformation de vrais intellos de l’époque en personnages de fiction, se vautrant dans le stupre et d’obscures spéculations linguistiques. Autre consigne : des phrases au présent, jetées comme des indications de scénario, en une succession de courts paragraphes : « Foucault débarque (…) Foucault demande des nouvelles(…) Foucault prend Derrida à part (…) Foucault dit qu’il n’aurait pas fait une chose pareille (…) »
L’astuce du siècle consiste à injecter au goutte-à-goutte un certain suspens ‒ absolument indispensable pour faire passer les bourratives digressions : un mystérieux document disparait, dont veulent s’emparer un espion bulgare avec son pébroque, deux moustachus à la Dupondt et les membres de la secte des coupeurs de doigts, le Logos club, où sont organisées des joutes verbales dont les perdants sont amputés !
L’auteur se marrait peut-être en échafaudant son petit scénario à la Tintin, mais la caricature et la dérision, ça va un moment ‒ dans une BD peut-être mais pas en littérature ‒ tout ça pour découvrir à la fin que si Mitterrand (ben, l’homme du secret, pardi !) a été élu en 81 et réélu, c’est qu’il était en possession du fameux document-mystère ! Et vous savez quoi ? Il s’agit de la septième fonction du langage, qui n’est autre que la technique de la manipulation verbale…
Je vous laisse digérer cette trouvaille.
J’avoue que j’ai failli abandonner la lecture de cette œuvre géniale sélectionnée pour le Goncourt, après cet extrait, page 439 : « Le sophiste au bec de médecin cale les couilles de Sollers entre les deux lames du sécateur, empoigne fermement les poignées, à deux mains, actionne le mouvement de cisaille. Et coupe.
Kristeva tressaille.
Sollers émet un bruit inconnu, un claquement de gorge suivi d’un long miaulement qui ricoche sur les toiles de maîtres et se répand dans toute la salle.
Le sophiste au bec de médecin ramasse les deux couilles et les dépose dans la seconde urne dont Simon et Bayard comprennent alors qu’elle a été prévue à cet effet.
Simon livide, demande à son voisin : « C’est pas un doigt, le tarif, normalement ? »
L’homme lui répond que c’est un doigt quand on défie un jouteur d’un rang juste au-dessus, mais Sollers a voulu brûler les étapes, il n’avait jamais participé à aucune joute et il a défié directement le Grand Protagoras. « Alors là, c’est plus cher. »
Je me dis que peut-être Binet envoie des messages subliminaux… que ça fait rire la rive gauche parisienne…
* « La septième fonction du langage » de Laurent Binet, Grasset.
15:32 Écrit par Claudine dans atelier d'écriture, Ce qui ne me plaît pas, discussion, langue, langage, littérature, Livre, publications, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
01 septembre 2015
Rencontre de salons...
Les salons de livres se multiplient et fleurissent dans toutes les agglomérations, souvent au profit des politiques ou des organisateurs d’associations qui ont, jusqu’ici, pu profiter de l’indigence des écrivains et/ou de leur popularité pour se faire mousser, faire le buzz ou nourrir leur insatiable ego… En tout cas rarement par amour de la littérature, excepté quelques salons « historiques » crées avec les meilleures intentions mais qui, hélas, ont perdu leur innocence depuis belle lurette.
Ainsi me trouvai-je au salon de Montmorillon, dont l’égérie fut Régine Desforges (et sa bicyclette bleue qui trône à l’entrée de la ville), cité dédiée aux librairies et aux calligraphes. Douglas Kennedy m’a dédicacé son dernier livre en même temps qu’il était harcelé par une sorte de garde chiourme de sa maison d’édition qui le traitait omme un incapable majeur…
Bref. Entre deux averses peu propices à la vente de livres, j’ai vu arriver une sorte de Rouletabille trentenaire, Jules Armand Maleterre, armé d’une caméra qui faisait une vidéo sur ce salon et qui a eu l’heureuse initiative de m’interviewer…
Voici cette vidéo, en lien ci-dessous :
https://www.youtube.com/watch?v=o7LGbH4cIW4
Il aurait fait, m’a-t-il annoncé, une critique du « Crime de River House » dans une autre vidéo, que j’attends de visionner avant d’en faire, à mon tour, la critique, ici même, il n’y a pas de raison !
Et Dimanche, à la Forêt des Livres, j’ai vu revenir vers moi à nouveau Jules dont la caméra est équipée cette fois d’un manche télescopique, car il devient professionnel, le bougre, pour m’interviewer à nouveau.
J’attends l’interviewer au pied du mur…
10:19 Écrit par Claudine dans interviews, littérature, Livre, publications, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
24 août 2015
Dimanche prochain : je dédicace à la Forêt des Livres
photo de Pierre Calmeilles
Le programme.
10 h. Au bûcher-théâtre de verdure, le colloque culturel animé par Jean-Claude Narcy : « Demain, une nouvelle Renaissance ? ».
11 h : inauguration devant le chalet des chasseurs.
12 h : déjeuner sur l’herbe (plusieurs points de restauration).
13 h 30 à 18 h : signatures-dédicaces dans l’allée des platanes et le parc du château de Chanceaux.
14 h : le café littéraire en plein air animé par Christian Panvert dans le champ devant le chalet des chasseurs, ainsi que les lectures animées par Philippe Chauveau au bûcher-théâtre de verdure.
17 h la pièce de théâtre « Gelsomina », conçue et interprétée par Pierrette Dupoyet à partir du film de Federico Fellini : « La Strada » (bûcher-théâtre de verdure).
18 h : remise des prix littéraires au balcon du chalet des chasseurs.
20 h : veillée littéraire chantée par Hervé Vilard devant le podium du café littéraire.
Entrée gratuite. Parkings obligatoires gratuits (navettes gratuites) : deux solutions selon la météo. Par temps sec parking sur terrain agricole (à La Baillaudière, acheminement des visiteurs sur le site par navettes de 9 h à 22 h, et le parking le plus proche, accès en venant de Dolus-le-Sec. Par temps de pluie, les seuls parkings desservis par les navettes seront ceux du Super U (1.650 places, navette de 9 h à 22 h) et du Leclerc (615 places, navette de 9 h à 22 h).
12:23 Écrit par Claudine dans littérature, Livre, publications, roman policier, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
03 août 2015
Livre papier contre livre numérique ?
En donnant sur FB, le 2 août à 20 h, mon point vue à propos du sondage de Livre Hebdo sur le comportement des lecteurs en vacances, je n’imaginais pas qu’une centaine de commentaires seraient postés en deux heures, accompagnés d’un millier de likes et de 347 partages…
Livre Hebdo révèle en effet que « d'après une récente étude menée par le site de voyage en ligne Opodo sur les comportements de lecture des Européens pendant l'été, les trois-quarts d'entre eux (74 %) disent préférer lire un livre papier pendant leurs vacances. »
J’ai fait remarquer, dans mon commentaire, qu’a contrario 26% des lecteurs préféraient le livre numérique en vacances, ce qui représentait un gros progrès !
Je jubile en effet de cette progression qui "nique" la sacro-sainte « chaîne du livre », cette chaîne journalistico-médiatico-éditoriale qui délimite le pré gardé des littérateurs chanceux, bien nés, bien entourés, bien pistonnés, bien encartés et autres trotskystes gallimardiens… en deux mots, cette chaîne de Ponzi* du business du livre…
Ces injustices sont peu à peu corrigées par le numérique qui procure aux « sans-dents » talentueux de la littérature, un lectorat potentiel, sans mainmise du pouvoir éditorial et journalistique avec pour seul critère de sélection le choix du lecteur et non celui du critique… dont Flaubert notait :
« Du reste ces articles ne sont pas convaincus ; on y sent un parti-pris, un dessous de cartes qui vous échappe »
Dans le Monde Littéraire, il n’est pas une semaine sans qu’un critique ne découvre le talent ou le génie un auteur mort dans l’indifférence… tandis qu’on encense d’un jugement de monsieur-je-sais-tout : « voilà ce qui fonde la bonne littérature ! » un auteur du sérail qui va parader quelques jours dans les médias avant de sombrer dans sa propre médiocrité.
Oui, le numérique est le salut de l’écrivain « goulaguisé ». Je vends aujourd’hui des livres numériques à Bruxelles ou à Québec quand un libraire de ma ville condescend tout juste à entreposer mes romans dans sa réserve…
Le livre papier, le livre numérique : deux formes de lecture, certes, mais le même texte…
*NB : Comme chacun le sait, la chaîne de Ponzi est une escroquerie qui génère des revenus pour les plus anciens investisseurs grâce aux apports de capitaux des nouveaux. Question : l’édition ne fournit-elle pas aux auteurs stériles d’une maison d’édition devenus éditeurs, de confortables revenus versés sous forme de droits d’auteurs grâce à la commercialisation de nouvelles publications ?
On saisit l’importance de publier des gens connus, soutenus par une presse comparse, pour générer des bénéfices…
19:53 Écrit par Claudine dans discussion, e-book, littérature, Livre, publications | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
23 juin 2015
baromètre annuel sur les achats de livres.
« Si le marché du livre imprimé neuf, représentant 92% du marché global en valeur, connaît un recul un peu plus marqué (-1,4% en valeur et -1,7% en volume), ceux de l'occasion et du numérique sont en progression : +6% en valeur et +3% en volume pour les livres d'occasion (qui représentent 6% du marché global en valeur), +18% en valeur et +13% en volume pour les livres numériques, qui atteignent 2,3% du marché global en valeur.
08:29 Écrit par Claudine dans bibliothèques, médiathèques, discussion, langue, langage, littérature, Livre, livre audio, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
30 mai 2015
16ème Salon du livre de Montmorillon
Je dédicace les Polycarpe au salon de Montmorillon
les 13 et 14 juin prochain.
Parmi les nombreux auteurs présents :
Douglas Kennedy et Jean-Pierre Mocky...
;-))
18:30 Écrit par Claudine dans littérature, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
28 mai 2015
Amies lectrices, Amis lecteurs amboisiens...
La série des " Polycarpe" est enfin en vente
à l'Espace Culturel Leclerc à Amboise...
23:21 Écrit par Claudine dans littérature, Livre, Loisirs, publications, roman policier, Shopping | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
21 mai 2015
Bonne nouvelle pour POLYCARPE HOULE !
Mon cher POLYCARPE, pas très séduisant, mal fringué, avec son caractère lunatique, râleur et sarcastique est désormais reconnu persona grata sur le fichier national de la Bibliothèque Sonore !
Je remercie « la voix », Bernard Lassalle, qui rend merveilleusement bien l’atmosphère de mes romans et qui est en train de lire le 5ème tome.
Ci-dessous un lien pour entendre la « voix » de Polycarpe…
11:03 Écrit par Claudine dans bibliothèques, médiathèques, littérature, livre audio, publications, roman policier | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
17 mai 2015
Les Petits Secrets de "POLYCARPE" (9)
D'Alembert
Dans son livre au titre Nothombien : Le Magnétisme des solstices (Flammarion, 2013), Michel Onfray écrit, à propos du style dans le domaine de l’art :
« Ainsi le style. Si l’on nous demande d’y réfléchir, le premier mouvement consiste à convoquer quelques formules apprises jadis sur les bancs de l’école. Surgit alors le pavlovien : « le style, c’est l’homme » inspiré de Buffon qui écrit plus exactement, dans son discours de réception à l’Académie française, le 25 août 1753 : "le style est l’homme même " »
Plus loin :
« Parlant de Fontenelle, [D’alembert] écrit dans ses Mélanges littéraires : "Il a eu, comme tous les bons écrivains, le style de sa pensée." Que peut bien signifier avoir le style de sa pensée ? (…) Le style, en effet, c’est moins l’homme que la façon qu’aura son corps de musiquer son énergie propre. Précisons : les productions intellectuelles ne descendent pas du ciel, elles ne tombent pas toutes faites d’un empyrée où elles se trouveraient en vertu du bon vouloir des dieux qui, sous forme d’inspiration, gratifieraient tel ou tel d’un génie propre. (…) L’inspiration ne tombe pas du ciel, car elle monte d’un corps. »
Parmi les arguments hyper documentés de Michel Onfray développés dans les 38 chapitres de ce bouquin, j’y trouve à boire et à manger.
Je suis d’accord avec cette affirmation que l’inspiration ne tombe pas du ciel, je dirais qu’elle est l’effet du travail, par sérendipité… On travaille, on se remet sans cesse en cause, on recommence, on cherche et on trouve… autre chose que ce qu’on cherchait, mais en mieux… et c’est ce résultat meilleur qu’on est tenté de qualifier d’inspiré alors qu’il n’est que le produit du labeur.
Et contrairement à ce qu’on voudrait bien croire quand on débute, aucun génie n’a pu s’exempter d’apprentissage et de travail acharné.
Là où je ne suis pas d’accord avec Onfray, c’est que cette "inspiration" ne monte pas d’un corps. Certes, elle puise son énergie dans les sensations, ce qu’on voit, entend, touche, etc. Elle vient de l’univers où on vit, mais l’énergie ne fait rien sans l’intervention de la machine qui la transforme, et cette machine c’est le vécu de l’artiste.
N’en déplaise à Michel Onfray qui conteste Freud, c’est notre inconscient (personnel et collectif) qui transforme ce pénible vécu en art. Et cet inconscient n’est pas le corps, même s’il émane de notre cerveau, il est connecté avec notre environnement présent, passé et anticipé, pour ne pas dire futur. Je suis une fervente adepte de la communication des inconscients. Or donc, l’artiste reçoit et restitue autre chose que des sensations corporelles.
Le style, qui reflète l’auteur d’une œuvre d’art, c’est un peu le résultat d’un réglage individuel, en fonction de ce qu’il veut exprimer, de ce qu’il peut exprimer, et de ce qu’il arrive à exprimer.
Car tout l’art de l’art, c’est montrer la réalité humaine de sorte que tout le monde s’y retrouve, mais ce n’est pas toujours possible sauf à se brouiller avec les gens (je pense à Tchékhov, dont son livre de nouvelles La dame au petit chien l’a fâché avec toutes les dames de sa connaissance, et Dieu sait que c’est un chef-d’œuvre intemporel !) Et même dans les cas où il est possible de montrer la réalité, le résultat n’est pas toujours celui qui était prévu.
C’est un sujet sensible, pour moi.
J’accorde en effet beaucoup d’importance à ma "propre authenticité" : je veux écrire au plus près de que j’ai à dire, de ce que je veux évoquer, pour pouvoir me dire dans dix ans que je n’ai nullement honte de ma phrase. J’accorde aussi beaucoup d’importance à la façon dont sera reçu le paragraphe par ceux qui le liront. Je ne veux pas que le lecteur bâille d’ennui, ni me montrer pédante ou me la « jouer » grande écrivaine…
Je jongle sans cesse entre ces deux pôles : authenticité et communicabilité.
Je donne parfois en exemple le deuxième paragraphe de mon dernier Polycarpe aux personnes qui se renseignent sur les techniques d’écriture.
Ce paragraphe, je l’ai réécrit au moins une trentaine de fois, si ce n’est plus.
Je me suis demandé pourquoi cette affaire de style était si importante pour moi. D’ailleurs, les lecteurs passent ce paragraphe sans se rendre compte de quoi que ce soit, et pourtant…
J’ai voulu rendre les perspectives, indiquer le moment de la journée sans donner l’heure, insister sur le contraste dedans/dehors, évoquer la limpidité silencieuse du crépuscule tombant sur la campagne par opposition au charivari de la salle ; Je voulais le son (les criaillements des martinets), la couleur (le coucher de soleil cuivré). Et je voulais que les encadrements de fenêtres forment comme des encadrements de miniatures montrant un paysage de collines avec un chemin s’amenuisant vers le lointain… Or, quand j’arrivais à tout insérer dans mon paragraphe qui faisait une demi-page, j’imaginais le lecteur, abordant un roman dit « policier », pressé d’entrer dans l’action, se moquant comme de l’an quarante de la vue campagnarde miniaturisé dans les ors et les verts pâles du crépuscule… et je biffais. Je poursuivais l’écriture de mon roman… pour revenir le lendemain à la première page, réécrire, rebiffer… et cela jusqu’au paragraphe définitif, où j’ai opté finalement pour une description la plus évocatrice possible dans une sobriété de mots :
Les fenêtres grandes ouvertes encadraient des perspectives champêtres cuivrées par le soleil déclinant. Une escouade de martinets, excités par l’affluence exceptionnelle, passait et repassait devant les embrasures.
19:49 Écrit par Claudine dans les petits secrets de Polycarpe, littérature, roman policier, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
23 avril 2015
« Polycarpe » passe le Week-end à Oléron…
Je dédicace ma série policière à « Cita’Livres » Château d’Oléron.
Nous serons plusieurs écrivains tourangeaux sous la bannière "Signature-Touraine".
En prime ci-dessous,une carte postale,
conservée par mon grand-père Oléronais, tirée des 10 tomes de ses mémoires :
Départ du bateau pour la traversée pour l’ïle d’Oléron à la Pointe du Chapus
12:53 Écrit par Claudine dans association, bibliothèques, médiathèques, langue, langage, littérature, Livre, publications, roman policier, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
11 avril 2015
Stephen King : confidences d'un romancier...
« Ce qu’il y a de plus important, c’est le plus difficile à dire. Des choses dont on finit par avoir honte, parce que les mots ne leur rendent pas justice ‒ les mots rapetissent des pensées qui semblaient sans limites, et elles ne sont qu’à hauteur d’hommes quand on finit par les exprimer. Mais c’est plus encore, n’est-ce pas ? Ce qu’il y a de plus important se trouve trop près du plus secret de notre cœur et indique ce trésor enfoui à nos ennemis, ce qui n’aimeraient rien tant que de le dérober. On peut en venir à révéler ce qui vous coûte le plus à dire et voir seulement les gens vous regarder d’un drôle d’air, sans comprendre ce que vous avez dit ou pourquoi vous y attachez tant d’importance que vous avez failli pleurer en le disant. C’est ce qu’il y a de pire, je trouve. Quand le secret reste prisonnier en soi non pas faute de pouvoir l’exprimer mais faute d’une oreille qui vous entende. »
Stephen King, Différentes saisons, Albin Michel 1986
(Premier chapitre de la nouvelle : « L’automne de l’innocence »)
12:03 Écrit par Claudine dans confidences, littérature, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
15 mars 2015
Où peut-on trouver vos livres ? (question récurrente)
Ils sont disponibles à Cultura et la Fnac, chez quelques libraires qui bravent la dictature molle de la "chaîne du livre". N’hésitez pas à commander dans les librairies en ville et ne croyez pas les libraires qui prétendent qu’ils sont épuisés.
Sinon, vous pouvez aussi les télécharger pour 6,99€ sur les sites de vente en ligne (Amazon, chapitre.com, etc…)
Vous pouvez aussi les commander directement aux éditions Tutti Quanti, un bon de commande se trouve sur le site : www.editionstuttiquanti.com.
Et un grand merci à tous ceux d’entre vous qui les lisent… et postent des commentaires en ligne.
19:39 Écrit par Claudine dans e-book, littérature, Livre, publications, roman policier | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook | | Imprimer | |
20 février 2015
Les Petits Secrets de "POLYCARPE" (8)
"C’est un peu l’amanite que je mélange à la fricassée de cèpes pour que le poison passe inaperçu…"
Imaginez un gros poêle à bois, vous enfournez régulièrement des bûches qui s’enflamment au contact des braises, dans un foyer brûlant comme l’enfer, afin qu’il diffuse une bonne chaleur confortable. Eh bien, c’est ça, pour moi, écrire… Les colères qui brûlent en moi alimentent une œuvre paisible pour procurer un bon moment de lecture ‒ du moins est-ce l’objectif.
Ce qu’on ne soupçonne peut-être pas à la lecture des Polycarpe, c’est cette révolte, parfois la rage que les comportements injustes, indignes, les petits arrangements, les gros mensonges et la violence provoquent en moi et ont provoqué dans ma vie.
Derrière chaque volume il y a cette motivation colérique bien particulière, qui aiguillonne l’intrigue, mot après mot, page après page.
Ainsi, dans Le Vieux Logis, j’ai créé mon petit cénacle d’amis intelligents et anticonformistes, tant j’étais révoltée par la stupidité.
Le Pigeon noir dénonce les secrets de famille qui nous étouffent.
Le Nègre en chemise accuse l’imposture littéraire dont je ne suis pas la seule victime collatérale.
Le Nombre d’or met en scène des adultes irresponsables et coupables.
Le Crime de River House tisse le roman autour de la privation d’amour et de la cupidité, thème loin d’être épuisé et qui sous-tend également Cœur de Bœuf.
Dans le septième Polycarpe, les familles incestuelles seront sur le gril…
Évidemment, je brouille les pistes, j’inclus ces thèmes parmi d’autres dans mes récits, j’ai l’air de les utiliser pour faire diversion, alors qu’ils en constituent le socle.
C’est un peu l’amanite que je mélange à la fricassée de cèpes pour que le poison passe inaperçu… L’atmosphère cool des Polycarpe, c’est exactement l’antidote dont j’ai besoin pour contrecarrer le poison de mes colères, c’est pourquoi ne comptez pas sur moi pour écrire des romans vraiment noirs ou des polars saignants.
10:16 Écrit par Claudine dans les petits secrets de Polycarpe, littérature, Livre, roman policier | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook | | Imprimer | |
12 février 2015
De l’autre côté du miroir
Immergée dans la fiction profonde pour quelques mois, j’habite le vieux logis, j’ai retrouvé Polycarpe, Basile, Bérangère, Flora… et les autres ; je suis concentrée, c’est le début d’un long cheminement qui me conduira jusqu’à l’été.
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28 janvier 2015
Les Petits Secrets de "POLYCARPE" (extrait)
Un court extrait du prochain Polycarpe...
Pour comprendre l'infidélité d'Imogène dans "Coeur de Boeuf"
"Jamais, il n’aurait cru qu’Imogène ‒ fine mouche, caustique et cultivée ‒ fût susceptible de céder aux avances d’un Manant commercialisant des steaks d’autruches surgelés et de la laine de lamas. Ce type à la chevelure de Viking était du genre super-mâle musculeux, un concentré de testostérone, sans une once d’humour et considérant comme des sous-hommes les intellos tels que Polycarpe qui ont réussi grâce à leur haut niveau d’études, par empathie un peu poires, et n’exhibant pas leurs atouts.
Depuis la prépa vétérinaire, Polycarpe connaissait son Darwin jusqu’au bout des ongles et partageait avec le grand naturaliste anglais la théorie de la « queue du paon » ou celle des « bois du cerf », selon lesquelles ces ornements encombrants jouaient un rôle crucial dans la sélection sexuelle. Or Manant, à l’instar de ces grands mâles, obstruait les routes de campagne avec son énorme tracteur et, perché dans sa cabine, trônait comme un maharadja sur son éléphant. Sans doute Imogène avait-elle, sans le savoir, réagi comme une paonne ou une biche ? Dans le cas de la marchande de miel, le regret de n’avoir pas eu d’enfant avait sûrement constitué un motif supplémentaire de succomber aux charmes de ce veuf, père de quatre rejetons.
23:59 Écrit par Claudine dans les petits secrets de Polycarpe, littérature, roman policier, Science | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
06 janvier 2015
Les Petits Secrets de "POLYCARPE" (7)
Un après-midi d’été, nous arpentions les ruelles désertes de Crissay-sur-Manse labélisé « plus beau village de France », patrimoine déserté et figé dans ses vieilles pierres, quand une fragrance dans l’air ‒ que je n’avais jamais sentie nulle part ailleurs en Touraine jusqu’à ce moment‒ me téléportait dans la Charente de mon enfance et j’en ai frémi : des odeurs d’orties et de menthe écrasées, de pierres chaudes, de paille coupées, mêlées aux relents de moisissures arrivant par bouffées de recoins ombreux, d’entrées de chais…
Dans une sorte de rêve éveillé, j’ai superposé les deux villages, mon village d’autrefois plein de bruits, de vie, de malheurs et de joies, tantôt écrasé de soleil, tantôt fondant sous la pluie, et ce village pittoresque mais moribond, et je décidai que ma fiction se déroulerait là, dans cette petite agglomération revitalisée par la perfusion de mon passé charentais.
Comme la silhouette flageolante d’un voyageur venant de l’horizon, mon personnage principal se précisait progressivement : il serait comme nous, plein de défauts et plein d’angoisses, pas beau, pas laid non plus, mais je savais déjà qu’il serait très intelligent sous ses airs de monsieur-tout-le-monde ‒ encombré en quelque sorte de son intelligence comme tous ceux qui sont pourvus d’une lucidité et d’une compréhension hors normes. J’avais exclu de passer mes heures d’écriture avec un type ordinaire.
Il débarquerait de la ville, blasé, déprimé, pour renaître dans une sorte de biotope favorable, soudain effleuré par une utopie d’âge d’or, l’idée d’une petite société où le consumérisme, les apparences, la compétition (l’envie, la méchanceté et l’humiliation) seraient bannis, tout au moins dans un cercle de personnes sachant se reconnaître et devenant amies… J’avais envie de réhabiliter ces valeurs qui passent pour naïves, pour gnangnan disons-le, dans un monde de gagneurs et de guerriers, j’avais envie de les imposer et je le pouvais puisque je suis maître en mon royaume.
Ainsi ce sont constitués les grands traits de mon personnage et le décor de ma série, dont le premier mot n’était pas encore écrit.
Le menton dans la main, devant le calendrier des postes, je cherchai désespérément le prénom de ce brillant personnage pas très beau. Toutes mes références littéraires défilaient dans ma tête… Il était aussi sympa que Qwilleran, aussi grognon que Nestor, intuitif comme Hercule, intelligent comme Sherlock, etc. Il me fallait un prénom choc comme ceux-là, qui s’incruste dans la mémoire et devienne, par un effet de synecdoque, l’homme lui-même… la série elle-même !
Eurêka : je connaissais un brave homme prénommé Polycarpe, le mari de l’institutrice de mes enfants, ouvrier chez Michelin, un prénom qui nous avait toujours paru mystérieux et, qui plus est, un prénom de pape !
Je me suis surprise moi-même à établir une sorte de story-board avant de commencer cette « suite » romanesque. Je voulais la réussir, ne rien laisser au hasard, c’était mon défi… Il fallait border la fiction de contours précis, fixer les points essentiels, bref, créer une « bible » de critères dont la récurrence serait un confort de lecture, ce confort que j’éprouvais à la lecture de mes auteurs de séries préférés (comme cette chère Lilian Jackson Braun récemment disparue)
Ainsi, dès le départ, je cherchai à sous-tendre ma narration de valeurs simples comme la gentillesse et le bon sens et la bonne humeur qui sont les fondements du bonheur en société (qui ne sont pas cependant les valeurs les mieux partagées).
Mais fort est de constater qu’un certain nombre d’individus malfaisants s’emploient à rendre la vie des autres impossible, mésestiment et ridiculisent leurs congénères, réduisent en poussière tout acte généreux, bafouent l’intelligence et piétinent l’amour de leurs souliers à clous.
Eh bien, devant ce constat, une évidence s’imposait : dans mes romans, le crime symboliserait toute cette méchanceté et serait révélé puis puni ; mes personnages positifs, drôles, sympathiques, s’uniraient contre le Mal. Je voulais que les gens bien l’emportent sur les nuisibles et les pernicieux.
J’allais inventer un univers où, je l’espérais, mes lectrices et mes lecteurs aimeraient se plonger. Et quand j’ai eu des preuves que je partageais avec plusieurs centaines de lectrices et de lecteurs ce petit monde d’humanité, alors j’ai été baignée de reconnaissance comme d’une eau miraculeuse. Cette connivence littéraire constituait un baume pour mon âme, et permet la résilience qui cicatrise de vieilles plaies encore douloureuses.
Quoi qu’il en soit, j’ai ainsi créé tout un univers, et ça c’est un challenge, croyez-moi.
À suivre…
18:11 Écrit par Claudine dans littérature, publications, roman policier | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
29 décembre 2014
Les Petits Secrets de Polycarpe (6)
Le roman ne se définit pas seulement par la narration d’une histoire survenant à des personnages, en 350.000 signes sur une période et dans un lieu géographie donnés, y compris des retours en arrière ou des anticipations. Ça, c’est la performance au premier degré, ce que j’appellerais l’axe horizontal du récit ou l‘abscisse. Car, cette narration est arrimée à une autre dimension, l’axe vertical ou l’ordonnée, qui n’est pas exprimée, pas toujours perçue, mais qui lui demeure pourtant indissociable : il s’agit de l’implicite, du non-dit, des sous-entendus, du « sous-texte ».
L’axe vertical a la même fonction que la quille d’un bateau, maintenant sa trajectoire, l’empêchant de dériver sous la force des vents et le propulsant par sa résistance à l’océan. Chaque étape du roman, chaque phrase, dialogue, métaphore, description, ainsi que chaque personnage et le type humain qu’il représente, renvoient à une signification objective non exprimée qui relie l’écrivain à ses lecteurs, leurs inconscients étant reliés (voir la théorie de « l’inconscient collectif » de Jung).
C’est cet axe vertical qui confère au récit sa profondeur, sa portée universelle sans en être appesanti car le récit se déroule en surface, linéairement, sur un ton assez léger, quand bien même se produisent des catastrophes puisqu’elles finissent toujours par être surmontées, oubliées par ceux qui n’en sont pas directement affectés.
Cette théorie de l’architecture en croix que je me suis forgée en écrivant, j’ai le plaisir de la retrouver chez Guy de Maupassant qui l’exprimait, à sa façon, dans la préface de « Pierre et Jean », intitulée « le Roman » :
[…] la psychologie doit être cachée dans le livre comme elle est cachée en réalité sous les faits dans l'existence.
Le roman conçu de cette manière y gagne de l'intérêt, du mouvement dans le récit, de la couleur, de la vie remuante.
Donc, au lieu d'expliquer longuement l'état d'esprit d'un personnage, les écrivains objectifs cherchent l'action ou le geste que cet état d'âme doit faire accomplir fatalement à cet homme dans une situation déterminée. Et ils le font se conduire de telle manière, d'un bout à l'autre du volume, que tous ses actes, tous ses mouvements, soient le reflet de sa nature intime, de toutes ses pensées, de toutes ses volontés ou de toutes ses hésitations. Ils cachent donc la psychologie au lieu de l'étaler, ils en font la carcasse de l'œuvre, comme l'ossature invisible est la carcasse du corps humain. Le peintre qui fait notre portrait ne montre pas notre squelette.
Il me semble aussi que le roman exécuté de cette façon y gagne en sincérité. Il est d'abord plus vraisemblable, car les gens que nous voyons agir autour de nous ne nous racontent point les mobiles auxquels ils obéissent.
Il faut ensuite tenir compte de ce que, si, à force d'observer les hommes, nous pouvons déterminer leur nature assez exactement pour prévoir leur manière d'être dans presque toutes les circonstances, si nous pouvons dire avec précision: "Tel homme de tel tempérament, dans tel cas, fera ceci", il ne s'ensuit point que nous puissions déterminer, une à une, toutes les secrètes évolutions de sa pensée qui n'est pas la nôtre, toutes les mystérieuses sollicitations de ses instincts qui ne sont pas pareils aux nôtres, toutes les incitations confuses de sa nature dont les organes, les nerfs, le sang, la chair, sont différents des nôtres.
Efforçons nous d'être des stylistes excellents plutôt que des collectionneurs de termes rares.
Il est, en effet, plus difficile de manier la phrase à son gré, de lui faire tout dire, même ce qu'elle n'exprime pas, de l'emplir de sous-entendus, d'intentions secrètes et non formulées,que d'inventer des expressions nouvelles ou de rechercher, au fond de vieux livres inconnus, toutes celles dont nous avons perdu l'usage et la signification, et qui sont pour nous comme des verbes morts […]
La Guillette, Etretat, septembre 1887.
Maupassant insiste sur l’importance de ne pas étaler les mécanismes psychologiques qui sous-tendent les faits et gestes des personnages mais de les suggérer au travers de leurs comportements, or j’avais la même détermination en abordant mes « Polycarpe » : faire découvrir la psychologie de mes personnages indirectement grâce à leurs paroles, leurs gestuelles, leurs expressions, sans entrer dans les arcanes de leur pensées. Je voulais que les lecteurs fassent connaissance avec les personnages comme dans la vie, par déduction des apparences. Je m’étais lancé ce défi, persuadée qu’il y aurait une sorte de petit suspens à deviner à qui on avait vraiment à faire… et j’estimai que c’était une attitude « sport » de la part de l’auteur de ne pas étaler sa connaissance préalable des personnages, de laisser les invités (mes lecteurs) faire connaissance de mes nouvelles relations…
J’avoue que c’est un défi difficile à tenir sur la longueur d’une série, car il y a bien des moments dans le récit où l’auteur doit donner du grain à moudre au lecteur. N’empêche, le récit se structure et se solidifie sur les fondations psy des personnages.
Bien des romans contemporains n’ont pas de quille et dérivent quelques temps sur les flots factices et étincelants de la célébrité pour disparaître à l’horizon… vaisseau fantôme avec personne à bord pour l’éternité. Mais ça ne m’intéresse pas de les citer : ils ont suffisamment bouché l’horizon comme ça.
Dans ma prochaine note, je donnerai quelques pistes pour détecter l’implicite et le non-dit qui constituent ma véritable raison d’écrire et sous-tendent l’écriture des « Polycarpe ». Rien de spectaculaire, rien de philosophique, pas de crises d’ego, pas de révélations, mais des choses de la vie, émotionnelles, affectives, que nous avons forcément en commun, les lecteurs et moi-même, sur lesquelles se bâtissent mes romans...
18:56 Écrit par Claudine dans bibliothèques, médiathèques, les petits secrets de Polycarpe, littérature, roman policier | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
16 décembre 2014
Dernières dédicaces 2014...
Merci à mes lecteurs et lectrices, "polycarpiens-addicts" !
Ci-dessous, le texte de la conférence donnée à Saint-Avertin et à Loches sur les noms des personnages dans mes romans.
"Je ne peux pas commencer à écrire un livre si je n'ai pas le nom de mes personnages. Avec Polycarpe comme héros de ses romans policiers, en écho aux Hercule Poirot et autre Jules Maigret de la tradition littéraire à laquelle elle se rattache, Claudine Chollet a une vraie réflexion derrière le « baptême » des protagonistes de ses œuvres. « Rien n'est dû au hasard », confiait-elle hier au cours du 6e salon du livre Signature Touraine qui, ce dimanche encore, au moulin des Cordeliers, mêlera dédicaces et conférences."
Pierre Calmeilles, Nouvelle République du 14 décembre 2014
Les noms des personnages
Comme l’écrivait Flaubert à son ami Taine, « Un nom propre est une chose extrêmement importante dans un roman, une chose capitale. On ne peut pas plus changer un personnage de nom que de peau ».
De fait, je ressens exactement cela : quand le nom est mal choisi, je n’arrive pas à me familiariser avec le personnage et j’ai du mal à le visualiser, à l’imaginer, à le faire bouger, penser, discuter. Je suis en panne et je dois chercher un nom plus approprié.
Un lexicologue célèbre, Jean Pommier, a consacré tout un livre à l’onomastique chez Balzac (L’onomastique est la branche de la lexicologie qui étudie l'origine des noms propres, de personnes ou de lieux) où l’on voit que les noms ne sont jamais dus au hasard.
Je vais survoler l’onomastique de ma série des « Polycarpe ».
Dans mon choix des noms et prénoms de personnages, quatre principaux critères entrent en ligne de compte alternativement :
- soit une connivence avec ma propre histoire, avec mon vécu d’auteur,
- soit des sonorités ‒ allitérations ou consonances ‒ qui s’impriment facilement dans la mémoire pour donner du relief à un personnage secondaire.
- soit encore un deuxième degré de signification en guise de clin d’œil au lecteur.
- ou, enfin, j’utilise le prénom à contre-emploi pour produire dérision, ironie ou parfois pour valoriser un personnage déclassé…
En ce qui concerne le premier critère (connivence avec mon vécu d’auteur) :
Le personnage principal, Polycarpe Houle, en est l’illustration. C’est la clé de voûte de la série. D’où l’importance de son nom.
Quand j’ai commencé cette série, avec la détermination d’écrire plusieurs opus avec des personnages récurrents, j’avais une idée précise du genre de littérature que je voulais écrire : une intrigue criminelle sans cruauté, des petits meurtres entre amis, des assassinats au village… Des enquêtes d’amateurs prétextes à faire évoluer les gens, à révéler les caractères humains, sans complaisance pour la violence, et en privilégiant l’atmosphère et le style, et – ceci n’est pas la moindre des choses - en cultivant mon originalité.
Ainsi que l’affirmait le prolixe Gaston Leroux : « j’ai toujours apporté le même soin à faire un roman d’aventures, un roman-feuilleton, que d’autres à faire un poème. J’ai eu comme ambition de relever le niveau de ce genre si décrié ».
Je me situais donc dans cette lignée des auteurs de romans policiers du début du XXème qui avaient une conception ambitieuse et littéraire du roman populaire.
Le prénom de mon personnage principal devait être un hommage mes illustres confrères qui avaient affublé leurs héros de petits noms tels que Prosper, Arsène, Jules ou Hercule… Polycarpe, prénom d’une personne que je connaissais, me sembla convenir par son originalité. En plus l’étymologie apportait une épaisseur sémantique (Poly venant du grec polus signifiant : nombreux, plusieurs, et Carpe provenant du grec karpos, signifiant : le fruit : le tout évoquant fécondité et créativité)
Le patronyme de Houle est un clin d’œil à mon premier livre publié, un roman policier de la série du Poulpe, publié par les éditions de La Baleine (manière de rester dans le champ lexical de la mer, qui m’avait porté chance !)
Et pour fignoler un peu, je voulais caser toutes les voyelles dans les prénom et nom de mon personnage.
Sur le 2ème critère (sonorités, allitérations et consonances), j’ai pris modèle sur Walt Disney qui a su jongler avec les consonnes ou les voyelles, ainsi qu’avec le rythme de syllabes, pour nommer ses petits héros, tels que Donald Duke, Daisy Duke, Mickey Mouse, Minnie Mouse, etc.
J’ai appliqué ce principe avec mes personnages secondaires, pour leur donner du relief. Ainsi le coiffeur gay dont les lotions sont sabotées, et dont les clients ressemblent des poussins électrocutés, s’appelle Dany Daine, la correspondante du journal local est connue sous le nom d’Ida Darling, le cafetier instituteur de Rochebourg s’appelle Basile Bot, l’aide à domicile tunisienne est Salima Saoub et l’imposteur chanteur de blues a pris le nom de Billy Boy.
Pour illustrer le 3ème critère (qui joue sur les noms-indices, en rapport avec le récit), je peux citer Violette Parker du « Nègre en chemise ». Dans ce roman qui dénonce les « nègres » littéraire, Violette, ancienne enseignante, est la plume géniale et effacée de sa nièce parisienne qui signe les romans et reçoit tous les honneurs. Son prénom évoque l’encre des écoles d’antan et son nom une marque de stylo plume, son outil de travail. (Entre parenthèse, le côté prédateur d’Elvire est symbolisé par des vêtements à rayures jaunes et noires, à l’instar des frelons ou des guêpes, alors que justement, Violette mourra d’une piqure de guêpe …)
Je peux également citer Bérangère Santerre qui verra son domaine détruit dans un incendie le soir de Noël et se retrouvera sans biens, sans terre.
Elvire Augry, qui virera effectivement au gris après la résolution de l’énigme.
Dans « Le Crime de River House » : la victime Albertine a pour nom de famille Giraumont qui désigne une sorte de courge, le père ayant fait fortune dans les fruits et légumes. Elle épouse un Floche, contraction de « Filoche » puisqu’il la quitte et s’enfuit.
Mado Burlat, désirable maitresse de Floche, porte le nom d’un fruit appétissant. Franz Geheim est un allemand déserteur : Geheim, en allemand, signifie « chez soi ». Après sa désertion, il est chez lui en France.
La locataire du manoir, Arlette Pic, mère de la brave Nelly Pic et grand-mère de la monstrueuse Magali Pic, porte un nom qui la symbolise puisqu’elle agresse tout le monde.
Toujours dans ce même roman, nous avons un Simon Clampin, notaire, son patronyme évoque quelqu’un de lent, paresseux et nul en affaires, et rabat un peu son caquet. Jim Forban est d’emblée un suspect, comme l’indique son nom par ironie. Enfin, Robert Marzac, l’Universitaire distingué, porte un nom dérivé de Robert Darzac, le fiancé de Mathilde dans Le mystère de la chambre jaune.
Le 4ème critère rassemble les noms à contre-emploi, à sous-entendus ou à connotations littéraires. Ce sont des indications subliminales qui conditionnent (gentiment) le lecteur. Les patronymes à contre-emploi créent un décalage, une sorte d’oxymore d’où naît l’ironie. Ainsi Scarlett (qui évoque une merveilleuse jeune fille en crinoline) a épousé un dénommé Pochard, agriculteur.
Calamity, qui porte des chemises à carreaux et fait du cheval, s’avère être une amicale et pacifique jeune femme. Maryline, caissière de supermarché, à un prénom de star ; la sympathique Flora Bouton est totalement passée fleur. Félicité est une infirmière terrifiante. Chimène est une vieille pocharde. Cosette c’est une femme rouée, qui a épousé un certain Barge, etc.
Dans le dernier Polycarpe, « Cœur de bœuf », l’écolo-agitateur, s’appelle Gaël Manant de la Haute, pour le plaisir de télescoper les contraires, et pour tourner un peu en ridicule le personnage hâbleur.
Bob Gorax a conservé le nom initial que je voulais donner au véritable assassin, mais c’était trop gros comme ficelle et je fais dire au personnage qu’il porte malgré lui le nom d’un « méchant de série B ».
Les Ducoin sont des bourgeois qui snobent les gens du village.
Les sous-entendus ou les connotations littéraires créent une sorte de feuilletage qui donne de l’épaisseur : par exemple, le commissaire s’appelle Félix Barcq. Barcq est homonyme de « bark » en anglais qui signifie « aboyer », c’est un clin d’œil au commissaire Japp d’Agatha Christie. L’un jappe en anglais, l’autre bark en français… il aboie et il porte le prénom Félix d’un chat de BD.
Le nom des Busier est déterminé par un pigeon voyageur égaré, la buse étant un prédateur de pigeons.
Le gendre anglais de Polycarpe s’appelle Witson, mot à mot : fils de l’esprit, il est très intelligent, il a de l’humour.
Nous avons fait ensemble un tour parmi la petite foule de mes personnages. Cette liste est loin d’être exhaustive, puisque tous les personnages de mes livres sont pourvus d’un nom significatif, à des degrés divers, valorisant ou dévalorisant, selon mon degré de sympathie pour lui.
Vous me demanderez peut-être quelle mouche me pique de me compliquer ainsi la vie avec des noms de personnages qui pourraient s’appeler comme tout le monde ?
À cela, j’ai deux réponses :
La première est qu’il y a dans mes romans autant de Pierre, Paul, Jacques ou François, que dans les carnets roses de papa, autant de Théo, Léa, Matis où Noé que dans la société d’aujourd’hui. Simplement, c’est amusant de trouver le petit « plus » qui fera peut-être esquisser un sourire à mes lectrices ou à mes lecteurs.
J’ajoute que la lecture des rubriques nécrologiques offre parfois des surprises, telle cetteGuillemette du GOUPIL de BOUILLÉ, décédée le 3 novembre, que je ne connais pas mais qui prouve encore une fois que la réalité peut dépasser la fiction !
Je dirais en deuxième réponse que le risque que je prends en maniant cet humour peu conventionnel des noms propres, exprime bien ma liberté de créer, d’inventer, de tisser un lien privilégié avec mes lectrices et mes lecteurs.
J’ai aujourd’hui des preuves que ça fonctionne, que les gens apprécient, qu’ils comprennent l’intention joyeuse que je mets derrière ces jeux de mots et c’est particulièrement valorisant.
Je terminerai sur un dernier exemple en guise d’hommage : le jeune reporter du dernier « Polycarpe » : Cœur de Bœufs’appelle Laurel Boitel, qui est l’anagramme parfait de Rouletabille, le jeune reporter du Mystère de la chambre jaune.
Claudine Chollet
11:08 Écrit par Claudine dans discussion, interviews, langue, langage, littérature, Livre, publications, roman policier, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
11 décembre 2014
Les Petits Secrets de Polycarpe (5)
C’est en relisant « Passé imparfait » de Julian Fellows que j’ai compris ce qui fait la différence entre un bon roman [c’est-à-dire ce livre appétissant qu’on achète par gourmandise primé par les libraires, les jurys de magazines, ou encore les lycéens, voire les académies] et… un bon roman… littéraire ‒ tel que ce « Passé imparfait » de Julian Fellows ‒ du genre qui grave la comédie humaine sur les parois de la grotte, témoignage d’une humanité et non d’une classe sociale, d’un archétype humain et non d’un type lambda... Étant entendu que le type lambda, qu’il s’agisse d’un bourgeois bohème ou d’un dealer dans le Bronx, dans certaines conditions, peut tout à fait se retrouver dans un roman littéraire… c’est compliqué.
C’est compliqué parce que le texte littéraire ne sera pas, de toute façon, proposé à la dégustation sur les gondoles, subira auparavant de nombreux refus butés d’éditeurs, comme pourraient en témoigner Proust, Gracq, Céline, ainsi que le père d’Anne Franck avec le Journal de sa fille, Margaret Mitchell (Autant en emporte le vent), Richard Bach (Jonathan Livingston le Goéland) et J. K. Rowling (Harry Potter à l’école des sorciers)… ainsi que bien d’autres.
[Ceci dit sans acrimonie, ne vous méprenez pas. Je ne plaide pas ma cause… J’essaye seulement de décrypter le réel.]
« On ne sait s'il y a une crise de la littérature mais il crève les yeux qu'il existe une crise du jugement littéraire », écrivait déjà Julien Gracq, en 1949, dans « La littérature à l'estomac », José Corti[1].
C’est compliqué parce que l’originalité (c’est-à-dire la différence) d’un texte littéraire est perçue d’abord comme perturbante et ennuyeuse par les comités de lecture éditoriaux, pour lesquels un roman doit avoir la fonction d’un trou de serrure par lequel ils épient les gens de leur petit monde, si possible en train de s’encanailler.
C’est compliqué, enfin, parce que les éditeurs, manipulateurs de culture, brouillent habilement les cartes en publiant vertueusement des récits d’opprimés, des témoignages poignants du Monde entier, en comparaison desquels l’éventuel chef-d’œuvre d’un concitoyen passera pour une élucubration de petit-bourge trop bien nourri. Et ces mêmes éditeurs-manipulateurs de culture poussent le bouchon jusqu’à « découvrir » des petits bijoux littéraires oubliés dans leurs archives 10, 20, 30 ans après le décès des auteurs : il n’y a pas de semaine sans une semblable découverte dans la presse littéraire.
Quoi qu’il en soit, toutes les fictions qu’elles soient ou non littéraires nous distraient et nous instruisent, en nous livrant une tranche de vie, une expérience humaine, une situation inédite ; les deux nous emportent ailleurs que dans notre petite vie : autre lieu, autre époque, autres mœurs…
Mais, selon moi, le roman littéraire est au bon roman ce que la haute-couture est au prêt-à-porter : la différence réside dans la maîtrise d’une coupe, d’un biais, d’une pince, la qualité d’une étoffe, l’ajout d’une broderie, d’une dentelle. Ce qui équivaut en littérature à la maîtrise du plan et des retours en arrière, du découpage chronologique, de l’épaisseur psychologique, l’insertion dans un contexte social, le choix d’un angle de vue, l’ajout de personnages secondaires bien campés… La différence réside enfin, et surtout, dans l’empreinte durable que le roman littéraire laisse dans notre cerveau, la marque indélébile qui fera ensuite référence dans les circonstances de notre existence.
Ces grincheux complices des éditeurs qu’on appelle les libraires modifient sans arrêt les gondoles pour présenter les meilleures ventes passées ou supputées ‒ le critère universel étant que le roman surprenne dans sa conventionalité…
Je fais ici mon Lucchini et je répète en articulant : surprenne dans sa conventionalité…
Cet oxymore reflète exactement le marché du livre.
Si j’écris un jour une méthode à l’intention des pisse-copies débutants qui veulent réussir vite, je leur recommanderai de relater des relations humaines ultra conventionnelles, à coup de clichés, mais sous un angle rafraîchi, inséré dans l’époque, comme, par exemple, « La femme au carnet rouge » d’Antoine Laurin, Flammarion, 2014, le type de roman qui ne laisse aucune empreinte dans le cerveau…
C’est un exemple de « bon roman » bankable, mais non littéraire : une bluette plutôt touchante dont les personnages, bobos parisiens, sont assez falots ; le style est coulant, facile à lire, sans originalité, ni humour. Les clichés sont nombreux : Paris (valeur sûre), ses bistrots, l’inévitable ami gay, la fille qui aime son papa, les chats, aucune épaisseur sociale maladroitement compensée par l’allusion à un reporter de guerre, par un dégât des eaux…
On entend souvent parler de cliché, définissons-le : un cliché est une image ou une situation rebattue, apanage d’un groupe, d’une communauté, d’une classe sociale ; le cliché titille la fibre snobinarde, il rassure, déstresse, il renvoie au lecteur une image plutôt valorisante de la personne qu’il pourrait être, il flatte son narcissisme, c’est un artifice Pavlovien. Le cliché est l’outil d’un auteur de talent, évidemment pas celui d’un écrivain de génie qui trouve l’inspiration hors des sentiers battus.
Je m’aperçois que l’heure tourne… et je n’ai pas encore abordé l’idée qui me tient à cœur et que j’essaye d’exploiter dans mes « Polycarpe » : l’importance de l’architecture en croix du roman.
Considérez ce qui précède comme l’introduction du prochain billet… et admirez au passage l’art du suspens… hi ! hi !
[1] Anecdote symbolique : l'histoire dramatique du jeune John Kennedy Toole. Après avoir été rejeté par la quasi-totalité des éditeurs américains, le jeune homme, gravement dépressif, se suicida en 1969 à l'âge de trente-deux ans. L'éditeur Simon & Schuster avait osé qualifier son livre d'« indigent ». Comme le souligne la quatrième de couverture : « Le plus drôle dans cette histoire, pour peu qu'on goûte l'humour noir, c'est qu'aussitôt publié, le roman a connu un immense succès aux États-Unis et s'est vu couronné en 1981 par le prestigieux prix Pulitzer. » Le livre, traduit en dix-huit langues, a été vendu à plus d'un million et demi d'exemplaires. Il est aujourd'hui considéré comme un classique de la littérature américaine. On pourrait considérer la tragédie de John Kennedy Toole comme une leçon à méditer pour les auteurs malheureux. Ceux-ci ne doivent jamais désespérer.
14:28 Écrit par Claudine dans littérature, Livre, publications, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
09 décembre 2014
Salon du livre de "Signature-Touraine" le week-end prochain à Loches
Le salon "historique" de notre association d'auteurs et de petits éditeurs de Touraine !
Deux jours de rencontres, conférences, dédicaces, au Moulin de Cordeliers, à Loches : tous les genres de livres sont représentés, commentés par leurs auteurs.
Cette année, je propose un nouveau Polycarpe, le sixième : "Coeur de Boeuf", sorti fin mai dernier.
Le samedi et le dimanche à 15 h 45, je donnerai une petite conférence sur "les personnages de romans", inspirés des petits secrets de Polycarpe développés sur ce blog : c'est l'occasion de venir en discuter avec moi, si le sujet vous intéresse.
14:42 Écrit par Claudine dans association, interviews, littérature, Livre, publications, roman policier, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
02 décembre 2014
Dédicace à la Maison d'Annie, à Vouvray, dimanche 7
J'invite toutes mes amies à venir papoter avec moi, dimanche après-midi, entre 15 h et 17 h, chez Annie.
Outre mes "Polycarpe" que je me ferai un plaisir de dédicacer, la maison d'Annie regorge de possibles cadeaux de noël très sympas.
Je serai en compagnie d'un charmant confrère, Xavier Mathias, maraîcher bio, producteur de plants et de légumes à Chédigny (Indre et Loire). En plus de son activité de maraîchage, Xavier Mathias est Directeur technique et rédacteur pour la revue Les cahiers du potager bio, rédacteur pour les revues Rustica Hebdo, Tout en un Rustica et Pour nos jardins.
Il est aussi consultant pour la gestion des potagers du domaine de Chaumont-sur-Loire et du château de Valmer.
Il assure la formation continue au Potager du Roi à Versailles.
Alors... à Dimanche
10:43 Écrit par Claudine dans littérature, Livre, publications, roman policier, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
17 novembre 2014
Les Petits Secrets de "POLYCARPE" (4)
La série des Polycarpe n’est pas une création ex-nihilo ; son invention est due à la convergence d’expériences et d’épreuves dans mon existence, de coïncidences, de hasards ‒ j’irais jusqu’à parler de « synchronicités » ‒ constituant une sorte de biotope propice à l’éclosion et à la métamorphose d’une œuvre. Comme tout être vivant, une œuvre est le résultat du « hasard et de la nécessité », selon l’expression du biologiste Jacques Monod.
L’expérience initiale, qui a été l’étincelle de ma tardive « carrière » d’auteur, mérite d’être rappelée ici. Certains connaissent déjà cette histoire, mais ceux qui ne l’ont jamais entendue seront probablement surpris.
Durant nos vacances 1978, nous fuyons la Costa Brava, bondée et polluée, et traversons l’Ariège. Subjugués par la beauté du Couserans, site montagnard des Pyrénées, nous acquérons alors, pour une bouchée de pain, une grange à foin dépendant du hameau d’Estouéou-d’aut, dans la montagne. Les années passent. Nous retournons là-bas plusieurs étés.
Un jour de septembre 1994, je cherche chez mon libraire un roman policier de la série du Poulpe[1] alors à la mode et je tombe sur un des rares ouvrages de la série en rayon : « Le Pis rennais » de Pascal Dessaint. Le jeu de mot dans le titre et le quatrième de couverture attirent mon attention : le récit se passe dans la vallée du Couserans !
Or, je découvre en le lisant que l’action se déroule dans les parages de notre grange, laquelle sert de décor très précis à l’ultime scène de crime et à son dénouement. Moi qui entassais les manuscrits non publiés dans mes tiroirs depuis des années, j’y vois un signe du destin, une chance à saisir. J’écris à l’auteur, Toulousain d’adoption, qui me répond et m’explique qu’il pratique la randonnée dans cet endroit qui le fascine et me conseille de tenter ma chance dans cette série du Poulpe.
Alors que ces petits polars étaient écrits par des auteurs déjà réputés dans le milieu et qui se connaissaient entre eux, je saisis l’opportunité.
J’ai éprouvé une vraie satisfaction à écrire en deux mois et demi « Un petit lapsus très suspect » qui sera finalement sélectionné par l’éditeur (la Baleine-le Seuil)… mais quatre ans plus tard ! (Entre temps, l’éditeur avait déposé le bilan, puis rebondi).
Le 12 avril 2001, j’ai reçu le coup de fil du nouveau directeur me proposant la publication ; j’imagine que si j’avais déménagé, je ne l’aurais jamais su.
Le livre fut publié début 2002 et connut un vrai petit succès, vendu à près de 4000 exemplaires.
Mais il s’est produit une deuxième coïncidence et non des moindres, que je dois raconter avant de revenir à Polycarpe.
Je reviens sur les manuscrits entassés dans mes tiroirs…
J’avais écrit des romans, pendant et après mes études de lettres, et notamment « Mosaïque » qui avait attiré l’attention de Jérôme Lindon, directeur des éditions de Minuit (et président du syndicat des éditeurs). Je l’ai rencontré deux fois. Au cours du premier rendez-vous, il m’a fait beaucoup de compliments et m’a demandé de faire quelques modifications dans mon manuscrit. Les corrections faites, il m’a convoqué, satisfait, m’expliquant qu’on allait discuter d’un contrat d’édition.
Evidemment, à 25 ans, être publiée aux éditions de Minuit, qui réunissaient mes idoles littéraires de l’époque, c’était le rêve.
Le rêve a explosé en vol quand Lindon m’a fait part des réticences de son ami Robbe-Grillet, alors directeur du comité de lecture, à publier mon roman qui nécessiterait- je cite : « trop de moyens financiers pour promouvoir un auteur inconnu dont on ignorait s’il persévèrerait ».
J’ai toujours pensé que le cénacle des écrivains de Minuit ne désirait pas introduire une petite nouvelle dans la bergerie, provinciale un peu niaise, j’avais en outre ouvert une brèche dans l’idéologie du « nouveau roman » en réintroduisant des personnages et une « histoire » que leur théorie qualifiait d’éléments « bourgeois » et voulait supprimer .
« Vous reviendrez me voir, quand vous aurez une œuvre derrière vous » m’a déclaré Lindon, après deux heures de rendez-vous au cours desquelles il a détruit toutes mes illusions. Je ne cessais de le fixer sans ciller, comme hypnotisée par son visage de rapace.
Je suis rentrée en métro, ravalant mes larmes, mon manuscrit sous le bras.
Une femme debout sur le quai, station Saint-Michel, me fixait d’un regard terrible, j’avais l’impression en avançant qu’elle était illuminée par des projecteurs et je ne voyais qu’elle, sans comprendre pourquoi… et soudain, j’ai reconnu Simone de Beauvoir, coiffée de son turban.
De stupeur, j’ai laissé tomber mon manuscrit, je ramassai les feuilles dispersées et quand je me relevai, elle était partie.
Encore une fois, les années ont passé.
Et pour revenir à ce jeudi 12 avril 2001, une heure après que l’éditeur du Poulpe m’eut proposé de me publier, j’entends aux infos de 13 heures que Jérôme Lindon venait de mourir. Comme si son décès avait déverrouillé ma vocation.
La synchronicité de ces évènements reste pour moi à la fois mystérieuse et significative.
Il y a eu, au cours de l’écriture des « Polycarpe », d’autres synchronicités moins spectaculaires, dans le choix des noms, dans l’invention de lieux… mais je crois que la créativité artistique relève peu ou prou de la médiumnité…
[1] « Le Poulpe » est une collection de romans policiers publiée aux éditions Baleine, inaugurée en 1995 avec La petite écuyère a cafté de Jean-Bernard Pouy, également directeur de collection originel. Bien que chacun des épisodes soit écrit par un auteur différent, on y suit les aventures d'un même personnage, Gabriel Lecouvreur, un détective surnommé « Le Poulpe ». La collection a été adaptée au cinéma en 1998 (Le Poulpe, le film),
12:46 Écrit par Claudine dans art, bizarreries, idiomes, langages, insolite, langue, langage, littérature, publications | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
15 novembre 2014
LES PETITS SECRETS DE « POLYCARPE » (2)
Deviner ce que les gens masquent derrière les apparences rend la vie très amusante[1] et nourrit des intrigues divertissantes.
L’objectif que je m’étais fixé, en démarrant la série, consistait à :
- plonger le lecteur dans une atmosphère surtout pas tristounette (je voulais écrire le livre que qu’on a tous aimé lire en vacances, l’été sous un arbre, dans un pré, sur un perron, dans le silence grésillant de la canicule… qui vous transporte ailleurs pour quelques heures et dont on se rappelle toute une vie !
- croquer un panel de « types » humains identifiables (à jamais fascinée par la pertinence des « Caractères » de La Bruyère et par les personnages inoubliables (Frédéric Moreau, Rastignac, Julien Sorel) de Flaubert, Balzac et Stendhal)
- écrire les scènes selon un angle de vue délibéré, ce qui emprunte au cinéma, révèle la « patte » du romancier, apanage de l’art littéraire.
Des cadavres dans les placards, des secrets, des impostures, des fausses identités, des mystères ésotériques… ce sont ces petites douceurs (que savourent les écrivains de romans policiers non sanguinaires depuis le début du XXème siècle) qui servent des intrigues conçues comme le fil rouge des romans, autour duquel se tricotent des vies, autant précieuses que dérisoires, de personnes comme nous tous.
Le trait appuyé, est une dimension importante des « Polycarpe » : les gens sont épinglés dans leurs travers, on traite des modestes réussites comme des grandes victoires, les enterrements sont des obsèques quasi nationales… tout ce qui se passe est soit monté en épingle, soit rapetissé, toujours décalé par rapport au réel.
C’est ici qu’on retrouve ma préoccupation du point de vue, l’angle sous lequel on voit les scènes, est capital pour créer l’ambiance dont je parlais et la connivence avec le lecteur.
Ex : Dans « Le Pigeon noir », à l’enterrement dans le cimetière, je décris les personne depuis l’intérieur de la tombe, le bruit des pas sur les graviers est disproportionné, l’ex-voto apporté dans un carton à pizza représente une scène de tango, etc.
Comme dans un film, j’essaie de décrire les scènes en plan général, panoramique ou je zoome. Cela donne du champ, de la profondeur.
Croquer des types humains s’avérait une question plus délicate ayant fait le pari (avec moi-même) de faire découvrir les personnages au lecteur comme on découvre nos contemporains dans la vraie vie, sans savoir ce qu’ils pensent car on n’est pas dans leurs têtes, en se fiant à leurs gestuelles, à la tonalité de leurs voix, à leurs expressions ‒ très significatives pour qui sait voir. Je voulais aussi faire passer l’idée que nous avons plusieurs facettes dans la vie, principalement publique et privée.
Ma rencontre avec le véritable instituteur-cafetier de Crissay-sur-Manse (devenu Basile Bot dans la série) a été décisive : comme lui, mes personnages principaux exerceraient au minimum deux activités, la profession officielle et un hobby, symbolisant ainsi la dualité entre vie publique et vie privée. L’invention de ces « doubles casquettes » (marchande de miel/psychologue, assistante maternelle/artiste peintre, vétérinaire/bricoleur, homosexuelle athée/chanteuse de gospel, etc.) permet en outre toutes les combinaisons selon les nécessités de l’intrigue.
A suivre…
[1] C’est une distraction de collectionneur. On peut toujours dénicher de nouveaux modèles d’idéologues, mégalo, égocentriques, avides, arrivistes, prédateurs, pantouflards, mais également des cœurs d’or, des généreux, des gentils et des complexés.
La plupart des humains se contentent de faire bonne figure, pour être aimés, admirés, reconnus, certains en remettent une couche et se composent un personnage flatteur. Dans les romans policiers, ils constituent la cohorte des suspects : ils ont un petit quelque chose à cacher, mais ne sont pas des assassins.
Ce qui plus sportif à décrypter, ce sont les comportements des pervers qui enfouissent aux tréfonds d’eux-mêmes leurs déchets toxiques, sachant très bien que leurs pensées et leurs actes ne sont pas anodins, ne sont pas sains et qu’ils seraient exclus de leur communauté s’ils se montraient tels qu’ils sont.
Le pervers est celui qui pervertit les rapports humains, ce n’est pas plus compliqué que ça ! Ne cherchez pas plus loin, quand la relation humaine se dégrade, devient vénéneuse, produit des catastrophes, on est en présence d’un pervers. Taraudé par l’envie et le besoin de compenser ses manques, ses blessures narcissiques, ses angoisses, il se joue des tabous, les contourne pour instrumentaliser autrui, souvent ses proches. Il existe toute une gamme de pervers, du petit manipulateur au psychopathe mais tous s’absolvent, persuadés de la légitimité leurs intentions. C’est parmi ces derniers que se trouvent les meurtriers des intrigues policières.
20:42 Écrit par Claudine dans bibliothèques, médiathèques, insolite, langue, langage, littérature, Livre, Loisirs, roman policier | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
05 novembre 2014
Les Petits Secrets de "POLYCARPE" (3)
Les personnages de romans
(Ceci est l'introduction d'une communication que je fais le 16 novembre
au Manoir de la Tour à Saint-Cyr-Sur-Loire)
Les personnages romanesques sont des personnes fictives qu’on ne peut pas décrire dans le détail sans faire périr d’ennui les lecteurs. Aussi nous, les écrivains, leurs inventeurs, devons les évoquer au moyen de techniques littéraires afin de les rendre plus vrais et plus vivants.
Quand le travail est bien fait, le personnage se met d’ailleurs à exister ; le caractère que nous lui avons donné influe sur ses actes et sur l’intrigue ; il devient une personne autonome, qui impose ses faits et gestes, ses idées et… prend parfois l’ascendant sur l’auteur : j’ai déjà vécu personnellement ce genre de situation ; les personnages sont l’émanation de nos neurones et de nos émotions ; l’acte de création est une gestation et, comme un enfant, le personnage naît, croît et s’émancipe.
On me demande très souvent si je prends modèle de mes personnages parmi les personnes que je rencontre. En fait, jamais de façon aussi nette. Je picore des traits de caractères, des tics de langage, des gestes, des détails vestimentaires, à gauche et à droite, sans même y penser sur le moment, et je fabrique un portrait composite en essayant d’accorder le mental avec le physique ; il m’arrive aussi de recevoir dans un rêve la visite de quelqu’un que je ne connais pas et qui veut entrer dans ma fiction…
Le personnage est un peu le vampire de notre énergie ‒ un vampire reconnaissant qui, dans quelques cas inespérés, nous embarque avec lui dans la postérité.
Pendant l’écriture de Madame Bovary, Flaubert écrivait à Hippolyte Taine, le 20 novembre 1866 : « Les personnages imaginaires m’affolent, me poursuivent, — ou plutôt c’est moi qui suis dans leur peau. Quand j’écrivais l’empoisonnement de Mme Bovary j’avais si bien le goût de l’arsenic dans la bouche, j’étais si bien empoisonné moi-même que je me suis donné deux indigestions coup sur coup — deux indigestions réelles car j’ai vomi tout mon dîner »
À mon avis, cette « vampirisation » de l’énergie du romancier est l’une des conditions nécessaires à la postérité du personnage. On se rappelle, pour n’en citer que quelques-uns, Emma Bovary, Julien Sorel, Frédéric Moreau, Georges Duroy – le Bel-Ami de Maupassant, Solal de Belle du Seigneur, ou encore La dame au petit chien, de Tchekhov, de même que le populaire Arsène Lupin, lequel n’a pas laissé à Maurice Leblanc la liberté d’écrire autre chose.
Le paradoxe du vrai créateur consiste à donner une réalité durable à un personnage tout à fait irréel. Et ce personnage prend place dans notre généalogie comme un membre de notre famille. Par exemple, Claudine de Colette est un peu une vieille tata pour moi... Un personnage réussi n’est pas nécessairement un héros, c’est quelqu’un qui va s’incruster dans la mémoire collective, s’enraciner dans notre socle culturel.
Ces personnages, qui ont le statut d’archétypes humains, qui sont devenus des références, des repères ou des modèles, ne naissent jamais sous la plume d’auteurs à la mode, invités des talk-shows, célèbres avant d’avoir été lus, écrivant sur commandes des éditeurs, figurant au top ten des libraires, ou encore d’écrivains se mettant eux-mêmes en scène dans leurs livres. Ainsi que l’exprimait Albert Thibaudet, grand critique littéraire de l’entre-deux guerres, dans la « Nouvelle Revue Française » : « Le romancier ‟authentique‟ créé des personnages, le romancier ‟ factice‟ fait du copié-collé de personnes existantes, dont sa propre personne, le plus souvent ».
Reconnaissons que le romancier « factice » selon Thibaudet, a un grand avantage sur le romancier « authentique », c’est qu’il connaît la gloire de son vivant et l’enrichissement qui va avec…
Cela dit,quand un personnage s’avère être le clone plus ou moins travesti de son auteur, il fait de la figuration et ne marque pas durablement les esprits. Idem des personnages en carton-pâte qui ne sont que des personnifications de concepts ou d’idéologies, comme dans les livres de Jean-Paul Sartre, par exemple.
Inversement, dans son œuvre, Proust instille toute son énergie vitale au point que les personnes réelles qu’il décrit deviennent des archétypes du snobisme bourgeois.
Pour parvenir à rendre vraisemblable un personnage fictif, avec une économie de moyens et sans tomber dans la caricature, à l’instar d’un prestidigitateur, nous les auteurs, avons notre mallette de trucs et astuces pour les faire surgir de nulle part ; nous utilisons le décor, les descriptions, les dialogues, les figures de rhétorique, les symboles, la focalisation, etc. Ces méthodes d’écriture pourront faire l’objet d’une prochaine conférence.
Nous allons nous contenter de développer un point particulier qui caractérise le personnage romanesque : son nom.
(lire la suite sur les "pages" de ce blog : colonne de droite)
19:09 Écrit par Claudine dans discussion, langue, langage, littérature, Livre, publications, roman policier, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
06 octobre 2014
LES PETITS SECRETS DE « POLYCARPE »
Lors des dédicaces, rencontres, débats, on me demande toujours comment m’est venue l’idée d’écrire la série des "Polycarpe", où je trouve mon inspiration, comment je crée mes personnages, pourquoi je les affuble de ces noms, etc. Et je réponds bien volontiers mais toujours partiellement, faute de temps.
Ça serait quand même ballot de ne pas faire savoir son savoir-faire, si je peux oser ce chiasme, avec les moyens de communication dont on peut disposer actuellement.
Tout au long d'une chronique, sur ce blog, je vais dévoiler l’image dans le tapis, selon le titre d’une célèbre nouvelle d’Henri James (The Figure in the Carpet).
Le narrateur de cette fiction anglaise suppose que seuls quelques rares initiés clairvoyants peuvent comprendre l’essence d’un livre, le secret qui préside à la création. Je ne suis pas certaine que quiconque parvienne à décrypter complètement ce secret fictionnel sans un coup de pouce du romancier qui est seul à savoir ce qui a motivé ses choix.
[Pas un récit chez Henry James, sans ce canevas serré autour d’un secret. Prétexte à un savoir qui ne cesse pas de se supposer et se soupçonner, le secret circule entre les personnages, fait lien entre eux autour d’hypothèses de vérité et de stratégies de positions, sans jamais se révéler précisément. L’insolite et le déroutant relèvent du cœur même de la cible : quelque part, on sait quelque chose.]*
[Il n’est sans doute pas superflu de signaler que Henry James fut longtemps méconnu, voire ignoré de la critique. Il se considérait incompris, ses romans n’ayant pas de son vivant rencontre l’éloge ni le succès, à l’égal d’un art auquel il consacra sa vie entière. L’accusation portée contre les critiques inaptes à découvrir et à faire savoir un talent, est d’autant plus vive qu’en effet, dans cette nouvelle, H. James fait de la méconnaissance, voire de la méprise, basées sur l’ignorance, le fondement d’un savoir caché, lové dans le corps du texte et répondant d’un savoir caché en chacun, notamment le lecteur ou le critique, savoir caché pour autant qu’il est refoulé.]*
*Les citations sont de Osganian Valérie, « Structure littéraire, structure littérale » La passion du secret chez Henry James. Le motif dans le tapis, Essaim, 2001/2 no8, p. 85-102. DOI : 10.3917/ess.008.0085
Revenons à Polycarpe...
Polycarpe chez Cultura
Première indication, d'ordre général :
Le secret de la trame criminelle est la métaphore du secret des êtres humains, de leurs vies. Je suis hantée par les secrets, je ne peux jamais aborder quelqu’un sans me demander quel secret est enfoui en lui.
Cette « obsession » du secret est une des clés de mon inspiration.
Je développerai dans un prochain billet.
à suivre...
19:20 Écrit par Claudine dans art, discussion, littérature, Livre, publications, roman policier | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook | | Imprimer | |
23 septembre 2014
En direct de PH 7 (Polycarpe n° 7)...
Un aperçu du chaudron où se mijote le futur Polycarpe.
Une page de carnet qui annonce le titre…
Et une lointaine ébauche du dessin de couverture… enfin... peut-être !
;-) Où sont les méchants ???
10:29 Écrit par Claudine dans insolite, langue, langage, littérature, Livre, roman policier | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
07 septembre 2014
LA MAISON D'ANNIE
Une libraire qui commande mes livres et les paie comptant, par paquets de 10 exemplaires, sûre de les vendre… c’est assez rare et ça mérite un petit coup de pub !
C’est Annie Joliveau de VOUVRAY. Outre sa librairie en ville, elle offre à la vente dans une jolie villa 1930 au bord de l’eau, toute la déco rêvée, parmi laquelle se nichent mes bouquins. Une dédicace aura lieu en octobre ou novembre.
20:09 Écrit par Claudine dans insolite, littérature, roman policier, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
01 septembre 2014
« FORÊT DES LIVRES » 2014, UN BON CRU POUR « POLYCARPE »
MERCI du fond du cœur à toutes les personnes pour lesquelles, hier, à La Forêt des Livres, j’ai dédicacé mes romans (en moyenne une dédicace chaque quart d’heure).
À tous mes fidèles lecteurs qui m'ont communiqué leur enthousiasme, leur attachement à mes personnages, à l’ambiance de la série, à l’originalité de mon style… Et merci également aux nouveaux « Polycarpiens » qui exprimaient leur hâte de se plonger le soir même dans la lecture de mes livres.
Vous m’avez transmis tellement d'ondes positives que je vogue ce matin sur une sorte de nuage d’optimisme. C’est encourageant et très stimulant pour la création.
Pour vous tous, dès ce matin, j’attaque le 7ème Polycarpe dans la joie et la bonne humeur !
11:51 Écrit par Claudine dans littérature, Livre, roman policier, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
31 juillet 2014
Extrait de Nouvelles et Contes, II, H. de Balzac, 1832-1850, Quarto
(La maison de Balzac, à Saché, en Touraine)
"- Mon Dieu ! Quel délice qu’une semblable maison de campagne ! s’écrie Caroline en se promenant dans les bois admirables qui bordent Marne et Ville d’Avray.
Et de courir comme une biche, et de redevenir la jolie, naïve, petite, adorable pensionnaire qu’elle était !... Ses nattes tombent ! elle ôte son chapeau, le tient par les brides.
- Ça te plairait donc bien, ma chérie, une maison de campagne ? dit Adolphe en tenant Caroline par la taille et la sentant qui s’appuie comme pour montrer sa flexibilité.
- Oh ! tu serais assez gentil pour m’en acheter une ?...
La maison de campagne est une maladie particulière à l’habitant de Paris. Cette maladie a sa durée de guérison.
Adolphe achète donc la campagne, et il s’y installe avec Caroline, redevenue sa Caroline, sa Carola, sa biche blanche, son gros trésor, sa petite filles, etc.
Voici quels symptômes alarmants se déclarent avec une effrayante rapidité.
La viande est moins chère à Paris. Les fruits sont hors de prix. Avant de pouvoir récolter les fruits chez soi, où il n’y a qu’une prairie suisse environnée de quelques arbres verts qui ont l’air d’être empruntés à une décoration de vaudeville, les autorités rurales, consultées, déclarent qu’il faudra dépenser beaucoup d’argent et – attendre cinq années !... Les légumes s’élancent de chez les maraîchers pour rebondir à la Halle, mais les légumes du jardin venus sous les bâches à force de terreau coûtent deux fois plus cher que ceux achetés chez la fruitière qui paie patente.
Les primeurs ont toujours à Paris une avance d’un mois sur celles de la campagne.
De huit heures du soir à onze heures, les époux ne savent que faire, vu l’insipidité des voisins, leur petitesse et les questions d’amour-propre, soulevées à propos de rien. Alphonse remarque, avec la profonde science de calcul qui distingue un ancien notaire, que le prix de ses voyages à Paris, cumulé avec les intérêts du prix de la maison de campagne, avec les impositions, les réparations, les gages du concierge et de sa femme, etc., équivaut à un loyer de mille écus !
On convient qu’une maison de campagne, loin d’être un plaisir, est une plaie vive…
- Je ne sais pas comment on ne vend que 5 centimes à la Halle un chou qui doit être arrosé tous les jours, dit Caroline.
- Mais, répond un petit épicier, le moyen de s’en tirer, à la campagne, c’est d’y rester, d’y demeurer, de se faire campagnard, et alors, tout change…
Caroline en revenant, dit à son pauvre Adolphe :
-Quelle idée as-tu donc eu là, d’avoir une maison de campagne ?... Ce qu’il y a de mieux en fait de campagne, est d’y aller chez les autres !
Adolphe se rappelle un proverbe anglais qui dit : « N’ayez jamais de journal, de maîtresse, ni de maison de campagne ; il y a toujours des imbéciles qui se chargent d’en avoir pour vous… »
Signé : Honoré de Balzac
16:01 Écrit par Claudine dans art, discussion, femmes, langue, langage, littérature, Livre, Loisirs, publications, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
11 juillet 2014
"Théorie de la vilaine petite fille" d'Hubert Haddad
Un roman dont on se délecte du style.
Il m'est arrivé deux fois seulement de relire un livre en boucle, en reprenant au début dans la foulée, juste pour le plaisir du style, pour m'imprégner des tournures de phrases, des évocations, pour comprendre comment Haddad écrit et nous immerge dans une époque, nous emporte comme un bagage dans le temps et l'espace... et en m'obligeant à noter tous les mots inconnus de moi ou employés sous des formes adjectives ou substantives que je n'avais encore jamais rencontrées.
L'autre livre, c'était "Belle du Seigneur".
J'ai établi la liste de ces mots rares et leurs définitions que je poste sur une page de mon blog en haut à droite...
18:28 Écrit par Claudine dans art, bizarreries, contes et légendes, discussion, langue, langage, littérature, Livre, publications, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |