08 septembre 2015
l'expression "du coup"... ça continue !
Pour ceux qui suivent et commentent depuis près de 10 ans mon post révolté contre l’expression « du coup », un journaliste du « télégramme » m’a signalé une thèse norvégienne, de Katerine Malm, sur ce sujet, que je mets en lien ci-dessous.
Ce tic ou toc de langage atteint maintenant toutes les catégories socio-professionnelles.
C’est une facilité de langage, une rhinocérite à la Ionesco, que nous devrions essayer d’éradiquer.
“L’objet de ce mémoire est l’expression adverbiale du coup. Nous avons observé que même si cette expression est couramment utilisée, il est difficile de décider de son interprétation dans certains contextes, et par conséquent il est aussi difficile de décider de son utilisation. De plus, nous avons l’impression qu’elle n’est pas beaucoup décrite dans la littérature linguistique. Par cette étude, nous chercherons donc à en savoir plus sur l’expression du coup…”
La suite ici : http://munin.uit.no/handle/10037/3647
10:37 Écrit par Claudine dans discussion, idiomes, langages, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook | | Imprimer | |
12 mai 2015
Atelier d'écriture
J’ai animé, à une semaine d’intervalle, une rencontre d’auteur(e) puis un atelier d’écriture, organisés par l’association contre l’illettrisme (Croix Rouge). Alors que j’avais été confrontée dans ma vie professionnelle à des apprentis en CFA totalement rétifs à l’instruction du français, ces « apprenants » marocains, algériens, portugais, brésilien, etc. ont fait preuve d’un enthousiasme et d’une ardeur à dialoguer, à écrire, luttant contre leurs lacunes et leurs complexes pour progresser.
Certaines femmes font preuve de sensibilité et de délicatesse, l’une d’elle, Kani Maryam Bagag, a écrit des poésies touchantes dont celle-ci :
Mon oiseau
Vole, mon oiseau, vole
En haut, très haut, vole
Tourne, entoure les montagnes
A côté des vallées, des cascades
Ouvre bien tes ailes
Embrasse le ciel et les nuages
En présence du soleil chante,
Et avec la brise danse !
Vole, mon oiseau, vole
En haut, très haut vole
N’oublie pas que je suis en bas
Mais mon cœur très haut est avec toi !
10:28 Écrit par Claudine dans atelier d'écriture, femmes, idiomes, langages, langue, langage, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
17 novembre 2014
Les Petits Secrets de "POLYCARPE" (4)
La série des Polycarpe n’est pas une création ex-nihilo ; son invention est due à la convergence d’expériences et d’épreuves dans mon existence, de coïncidences, de hasards ‒ j’irais jusqu’à parler de « synchronicités » ‒ constituant une sorte de biotope propice à l’éclosion et à la métamorphose d’une œuvre. Comme tout être vivant, une œuvre est le résultat du « hasard et de la nécessité », selon l’expression du biologiste Jacques Monod.
L’expérience initiale, qui a été l’étincelle de ma tardive « carrière » d’auteur, mérite d’être rappelée ici. Certains connaissent déjà cette histoire, mais ceux qui ne l’ont jamais entendue seront probablement surpris.
Durant nos vacances 1978, nous fuyons la Costa Brava, bondée et polluée, et traversons l’Ariège. Subjugués par la beauté du Couserans, site montagnard des Pyrénées, nous acquérons alors, pour une bouchée de pain, une grange à foin dépendant du hameau d’Estouéou-d’aut, dans la montagne. Les années passent. Nous retournons là-bas plusieurs étés.
Un jour de septembre 1994, je cherche chez mon libraire un roman policier de la série du Poulpe[1] alors à la mode et je tombe sur un des rares ouvrages de la série en rayon : « Le Pis rennais » de Pascal Dessaint. Le jeu de mot dans le titre et le quatrième de couverture attirent mon attention : le récit se passe dans la vallée du Couserans !
Or, je découvre en le lisant que l’action se déroule dans les parages de notre grange, laquelle sert de décor très précis à l’ultime scène de crime et à son dénouement. Moi qui entassais les manuscrits non publiés dans mes tiroirs depuis des années, j’y vois un signe du destin, une chance à saisir. J’écris à l’auteur, Toulousain d’adoption, qui me répond et m’explique qu’il pratique la randonnée dans cet endroit qui le fascine et me conseille de tenter ma chance dans cette série du Poulpe.
Alors que ces petits polars étaient écrits par des auteurs déjà réputés dans le milieu et qui se connaissaient entre eux, je saisis l’opportunité.
J’ai éprouvé une vraie satisfaction à écrire en deux mois et demi « Un petit lapsus très suspect » qui sera finalement sélectionné par l’éditeur (la Baleine-le Seuil)… mais quatre ans plus tard ! (Entre temps, l’éditeur avait déposé le bilan, puis rebondi).
Le 12 avril 2001, j’ai reçu le coup de fil du nouveau directeur me proposant la publication ; j’imagine que si j’avais déménagé, je ne l’aurais jamais su.
Le livre fut publié début 2002 et connut un vrai petit succès, vendu à près de 4000 exemplaires.
Mais il s’est produit une deuxième coïncidence et non des moindres, que je dois raconter avant de revenir à Polycarpe.
Je reviens sur les manuscrits entassés dans mes tiroirs…
J’avais écrit des romans, pendant et après mes études de lettres, et notamment « Mosaïque » qui avait attiré l’attention de Jérôme Lindon, directeur des éditions de Minuit (et président du syndicat des éditeurs). Je l’ai rencontré deux fois. Au cours du premier rendez-vous, il m’a fait beaucoup de compliments et m’a demandé de faire quelques modifications dans mon manuscrit. Les corrections faites, il m’a convoqué, satisfait, m’expliquant qu’on allait discuter d’un contrat d’édition.
Evidemment, à 25 ans, être publiée aux éditions de Minuit, qui réunissaient mes idoles littéraires de l’époque, c’était le rêve.
Le rêve a explosé en vol quand Lindon m’a fait part des réticences de son ami Robbe-Grillet, alors directeur du comité de lecture, à publier mon roman qui nécessiterait- je cite : « trop de moyens financiers pour promouvoir un auteur inconnu dont on ignorait s’il persévèrerait ».
J’ai toujours pensé que le cénacle des écrivains de Minuit ne désirait pas introduire une petite nouvelle dans la bergerie, provinciale un peu niaise, j’avais en outre ouvert une brèche dans l’idéologie du « nouveau roman » en réintroduisant des personnages et une « histoire » que leur théorie qualifiait d’éléments « bourgeois » et voulait supprimer .
« Vous reviendrez me voir, quand vous aurez une œuvre derrière vous » m’a déclaré Lindon, après deux heures de rendez-vous au cours desquelles il a détruit toutes mes illusions. Je ne cessais de le fixer sans ciller, comme hypnotisée par son visage de rapace.
Je suis rentrée en métro, ravalant mes larmes, mon manuscrit sous le bras.
Une femme debout sur le quai, station Saint-Michel, me fixait d’un regard terrible, j’avais l’impression en avançant qu’elle était illuminée par des projecteurs et je ne voyais qu’elle, sans comprendre pourquoi… et soudain, j’ai reconnu Simone de Beauvoir, coiffée de son turban.
De stupeur, j’ai laissé tomber mon manuscrit, je ramassai les feuilles dispersées et quand je me relevai, elle était partie.
Encore une fois, les années ont passé.
Et pour revenir à ce jeudi 12 avril 2001, une heure après que l’éditeur du Poulpe m’eut proposé de me publier, j’entends aux infos de 13 heures que Jérôme Lindon venait de mourir. Comme si son décès avait déverrouillé ma vocation.
La synchronicité de ces évènements reste pour moi à la fois mystérieuse et significative.
Il y a eu, au cours de l’écriture des « Polycarpe », d’autres synchronicités moins spectaculaires, dans le choix des noms, dans l’invention de lieux… mais je crois que la créativité artistique relève peu ou prou de la médiumnité…
[1] « Le Poulpe » est une collection de romans policiers publiée aux éditions Baleine, inaugurée en 1995 avec La petite écuyère a cafté de Jean-Bernard Pouy, également directeur de collection originel. Bien que chacun des épisodes soit écrit par un auteur différent, on y suit les aventures d'un même personnage, Gabriel Lecouvreur, un détective surnommé « Le Poulpe ». La collection a été adaptée au cinéma en 1998 (Le Poulpe, le film),
12:46 Écrit par Claudine dans art, bizarreries, idiomes, langages, insolite, langue, langage, littérature, publications | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
16 septembre 2014
Pour en finir (?) avec l'expression "du coup"
« Du coup » s’installe dans notre paysage linguistique.
Maintenant cette locution ne se réfère plus seulement à une causalité récente mais constitue à elle seule une référence : j’ai remarqué que des journalistes de BFM l’emploient pour évoquer tout ce qui s’est passé dans la vie d’un homme politique, économisant ainsi un fastidieux rappel des faits, partant du principe que tout le monde est au courant et débutent leurs commentaires par « du coup » qui prend alors une portée métaphorique…
L’Académie Française peut avérer cet emploi, cette brave institution a tendance, ces dernières années, à introduire des mots de la rue avec un peu trop de précipitation…
J’apporterais au débat* une nouvelle nuance pour expliquer cet emploi frénétique, je crois que nos concitoyens ont tout simplement du mal à se projeter et à anticiper.
C’est une gymnastique douce des neurones qui consiste à faire précéder la proposition principale par la subordonnée conjonctive, ex : « comme elle arrive demain, je dois préparer sa chambre », ou « puisqu’elle arrive demain… », ou « parce qu’elle arrive demain… », de fait, il est plus simple de déclarer voire de claironner : « elle arrive demain, du coup je dois préparer sa chambre ! »
La conjonction de subordination (que, lorsque, puisque, quoique, comme, si et quand), ou une locution conjonctive (parce que, bien que…) servent à marquer qu'il existe un lien de dépendance entre une proposition et un terme de la proposition principale. Son emploi exige un tout petit apprentissage, c’est comme le vélo, le calcul mental, la nage… une fois acquis, ça ne s’oublie pas…
* Je remonte le débat des archives... Il y a plusieurs années que j'ai lancé le débat sur ce blog (le 5 septembre 2006 !) et il y a toujours des posts...
18:02 Écrit par Claudine dans discussion, idiomes, langages, langue, langage, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
02 février 2013
LE HIP TCHATCHE DE « ELLE »
Dans le « ELLE » n° 3499, des mots, des figures de style et des expressions en anglais « customisé » constituent, me semble-t-il, l’idiome (parler spécifique à une communauté, Le petit Robert) de la branchitude.
Ce parler "écrit" crée la connivence entre les jolies jeunes femmes chic et riches (ou supposées telle) ; il nous suggère avec humour de l’adopter pour devenir membre de cette élite ; il nous fourre dans le crâne qu’être civilisé, c’est être snob.
Quelques exemples :
- la hype de l’expat’ - l’atout du style look - c’est classy - le néo-perf - un slim gentillet - grungy - gipsy bling - se faire un joli glow l’ultra-glam - des vagues de glam - la chic attitude - after-party ; - rétro-futuriste - must have - bottines so en hauteur - écouter les playlists - lipstick assorti - textures ultra-cocooning |
- les couples french kiss, french toast, french lib’ - it bag # le contraire du sac qui s’installe dans la durée - collections pink-shocking - les packagings font du bien à la déco - un site extra pour booker en ligne un soin beauté - racines [de cheveux] plaquées-glossées - meilleurs tutos pour un maquillage - blouson en jean vert Big Apple [qui] dédramatise de look - le glam et le strass sont en after toute la journée - le cuir est le signe du casual par excellence - oui au perf python avec top filet, yes au perf à épaules XXL - micro-short bubble-gum - des looks terriblement synchrones - se positionne dans le segment maquillage - une peau pulpy. |
Idée pour le prochain atelier d'écriture : composer un poème-centon à partir de ces expressions... Avis aux amateurs !
18:18 Écrit par Claudine dans discussion, idiomes, langages, langue, langage, publications, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |