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19 mars 2006

Les aventures de Polycarpe - 14 ème épisode

LE VIEUX LOGIS

 Chapitre XIV

Un crachin, qui pulvérisait sans discontinuer ses fines gouttelettes depuis quelques jours, baignait Rochebourg dans une atmosphère de port breton. Comme des pénitents, tête baissée sous leurs capuches, les gens traversaient les rues luisantes ; les lointains semblaient absorbés dans du coton hydrophile et les murs imbibés du château dressaient leurs pans sinistrement déchiquetés au-dessus des noires toitures d’ardoises.

Ceinturé dans une vieille gabardine et coiffé d’un vieux couvre-chef ramolli, Polycarpe sifflotait au guidon de son Solex, en éprouvant un bonheur puéril à zigzaguer sur la chaussée pour prendre de belles flaques bien au milieu et faire habilement gicler deux gerbes d’eau symétriques.

On était maintenant à la veille du concours de pêche ; les membres de l’alipa qui avaient secrètement espéré clouer le bec aux élus en organisant une joyeuse partie de campagne, scrutaient le ciel bouché, quelque peu nerveux avant cette journée décisive. Dans leurs K-way dégoulinants et bottés de caoutchouc, ils attendaient le matériel à installer, repérant l’endroit le plus aplani près de la rivière pour disposer la guinguette, prenant des mesures au sol à grandes enjambées et s’organisant pour le lendemain.

 L’irruption de l’anachronique vélomoteur interrompit une petite altercation : si le groupuscule des optimistes composé de Basile, Calamity et Imogène, prétendait que la truite mordait mieux par temps pluvieux, les pessimistes, Évariste et Constance, prédisaient un échec cinglant. Leur défaitisme ne les rapprochait pas pour autant, ils n’arrêtaient pas de se chicaner :

- Si le trésorier avait eu l’intelligence d’exiger le règlement de l’inscription avant le concours, que les gens viennent ou non, la somme serait restée acquise à l’association, clama Constance d’une voix sèche en fixant avec reproche la cime d’un peuplier.

Évariste plaida sa cause :
- C’est pas facile de réclamer l’argent quand les gens s’inscrivent par téléphone.
- Nous ne sommes pas encore rodés, dit Imogène sur un ton conciliant.
- Rodés ou pas, c’est une question de bon sens, renchérit Constance, ravivant la zizanie.

Calamity s’interposa :

- On fera mieux la prochaine fois en se munissant de carnets à souche !

- Il n’y aura peut-être pas de prochaine fois... du moins en ce qui me concerne !

Tous les regards s’orientèrent en direction de Constance, qui extrayait son bottillon d’une taupinière avec un air dégoûté et exaspéré.

- Personne n’est indispensable, fit remarquer le trésorier, un brin piqué.

- On est déjà au bord du clash, ça promet ! commenta joyeusement Basile, en se frottant les mains énergiquement.

Qu’il y ait foule ou qu’il n’y ait pas un chat, que Constance démissionne ou non, Polycarpe campait sur sa position de sympathisant impartial, refusant de se sentir concerné. Il s’estimait déjà assez poire de fournir le coup de main promis.

Le tracteur de la commune arriva enfin vers dix heures, remorquant un plateau chargé de poteaux, de bâches, de tréteaux et de chaises empilées. Il stoppa dans le chemin empierré qui descendait vers la Gourmette. Berouette, en ciré jaune, d’une humeur massacrante, descendit de la cabine.

- Putain, on en a chié pour charger, avec le collègue de Soutrain. Maintenant démerdez-vous, appelez-moi quand vous aurez terminé, je viendrai reprendre le bouzin.

Basile, que l’exaspération des uns et des autres rendait hilare, bondit sur le plateau et distribua le matériel. Les poteaux de soutien et les barres de traverse furent emboîtés. Ils arrimèrent l’ensemble, le recouvrirent de la bâche qu’ils fixèrent par des crochets passés dans les œillets ; ils installèrent de longues tablées en posant les plateaux sur les tréteaux, alignèrent les chaises. En un temps record, le chapiteau fut mis en place. Basile proposa ensuite à toute l’équipe d’aller se requinquer devant un thé ou un chocolat. Il s’approcha de Polycarpe :

- J’ai confié le café à Flora Bouton, je vais vous la présenter. Une mamie charmante qui a été danseuse de revues olé-olé dans sa prime jeunesse. Ma mère et Flora m’ont élevé. Elles ont été concubines, précurseurs en matière de Pacs !

 Polycarpe avait déjà rectifié pas mal de ses idées préconçues depuis son arrivée à Rochebourg  mais il en resta bouche bée. Basile lui bourra les côtes amicalement.

- Hé, c’est la vie !

Polycarpe récupéra son Solex qu’il mit au point mort pour le pousser en avançant aux côtés de l’instituteur, le long du sentier qui remontait vers le village, jusqu’au café.

- Mon père a été un amant d’un soir, dit Basile. Je l’imagine beau, fort et intelligent - Il prit une pose avantageuse - Je crois que je lui ressemble ! 

Alors qu’ils s’ébrouaient,  tapant leurs bottes sur le seuil, se défaisant de leurs imperméables avec des exclamations de galériens exténués, une extravagante personne, que Polycarpe supposa être l’ex-gogo girl, Flora Bouton, continuait imperturbablement de tricoter, une pelote sous le bras, assise sur un des hauts tabourets du bar. Une nébuleuse de cheveux gris s’échappait d’une insolite cloche gondolée qui devait dater de la dernière guerre.  Elle observait toute l’équipe par-dessus ses demi-lunes dont le cordon pendait devant ses joues. Un double menton et une bouche épaisse, le nez fin et l’œil narquois, lui donnaient l’air à la fois serein et perspicace ; les mains qui manœuvraient la laine et les aiguilles avec vélocité, finement striées de plis, évoquaient la patine des bois anciens.

- J’ai fait deux perroquets et un ballon, annonça-t-elle, en tirant un mètre de laine du milieu de la pelote.

- Flora, je te présente Polycarpe, annonça Basile, en attrapant un torchon pour essuyer les verres embués de ses lunettes, les regardant tour à tour, d’un œil myope et réjoui.

Elle déposa son tricot sur le bar et glissa de son perchoir. Elle portait une sorte de tunique couleur de ficelle, sur une longue jupe en tissu d’ameublement qu’elle avait sûrement confectionnée elle-même et elle était chaussée de tennis. Ses formes épaissies contredisaient la finesse de ses poignets et de ses chevilles, vestiges de son enjôlant passé. Elle saisit Polycarpe aux épaules, renversant la tête pour le regarder sous le bord de son chapeau cloche :

- J’ai voulu vous rencontrer, je suis allée au logis hier, mais vous n’étiez pas là, dit-elle, en lui plaquant une fraternelle bise sur chaque joue.

- Vous vouliez me rencontrer !

- Je voulais vous consulter pour Godichon : il a les oreilles molles.

- C’est un signe de carence affective, affirma Polycarpe à tout hasard. Est-ce un âne ?

- Merveilleux : vous avez deviné.

Il eut le triomphe modeste et l’air moqueur.

- Habitez-vous à Rochebourg ?

- Oui, mais je vais, je viens, s’exclama-t-elle, balayant l’espace de grands gestes. Je suis venue pour régler cette histoire d’assainissement, vous comprenez, je dois faire creuser une tranchée... Je ne vais pas piocher moi-même !

- Ne cherchez plus, dit aimablement l’ancien vétérinaire, pendant que vous batifolez sous d’autres latitudes, votre Godichon déprime...

- Je ne batifole pas, monsieur ! Je fais partie d’une chorale qui se produit dans les festivals...

- C’est évident, Flora, dit Calamity. Tout seul dans son grand pré, Godichon se languit.

Ils étaient maintenant assis autour de la table centrale et ceux qui n’étaient pas face au bar, se tournaient pour suivre la préparation des boissons chaudes que Basile tirait du percolateur et que Flora disposait sur un plateau.

- Vous devriez me le confier au Ranch, il se ferait des copains !

- La pension est au-dessus de mes moyens, vous le savez bien, Calamity !

- Ça peut s’arranger, si vous m’autorisez à lui atteler une carriole ou à le bâter pour promener des enfants...

- Par exemple, demain, nous pourrions proposer une petite promenade en âne, dit Imogène. Le problème : qui va tenir les rênes... Polycarpe ?

- Ah, non. Imogène, vous me harcelez ! Trouvez quelqu’un d’autre...

Imogène rosit d’embarras.

- Excusez-nous, Polycarpe.

Basile leva les mains pour se défausser :

- Impossible, je serai au barbecue.

Évariste fit de même :

- Moi, à la buvette et à la friteuse.

- Calamity et moi, nous faisons le service, nous nettoyons les tables et la vaisselle...  précisa Imogène. Et Constance... Mais : où est Constance ? C’est elle qui devait faire l’accueil, le tirage de la tombola et la remise des prix !

- Elle s’est tirée pendant qu’on installait les tables, dit Basile, en posant le plateau et en distribuant les tasses fumantes. Croyez-vous qu’elle viendra demain ? Moi, je suis sûr que non.

Il prit place près de Calamity et lui entoura nonchalamment la taille. Elle rassembla son épaisse chevelure dorée sur le côté et se blottit contre son épaule.

Évariste, encore ronchon, déclara :

- Tant mieux. Pour casser une ambiance, elle détient le pompon !

- Qui prendra sa place, alors ?

Flora s’approcha d’Imogène dans le bruissement de sa jupe et posa la main sur son avant-bras, l’air résolu et concentré :

- Mon petit voisin pourrait guider Godichon demain, pour promener les enfants pendant que je tiendrai le café. Pensez-vous que 2 euros la promenade d’un quart d’heure... ?

- C’est correct, affirma le trésorier. Je ne vous l’ai pas dit, Polycarpe, votre ami Gilles Alix s’est inscrit avec quelqu’un !

- Sa femme, Véro ?

Pendant un instant, Polycarpe espéra que l’histoire triste se terminait par une happy end.

- Un homme, un certain Sarrasin... Vous le connaissez ?

Polycarpe hocha affirmativement la tête lorsque Calamity lança à la cantonade :

- Savez-vous qui est venue plusieurs fois au Ranch cette semaine ?

- Je parie que c’est Iseult de Touche !

- Exact. Je l’ai trouvée très secouée par sa dernière hospitalisation. Et vraiment très bizarre : hier, elle a monté Mirador et l’a ramené dans un état épouvantable, en sueur, la bouche pleine d’écume... complètement affolé. Elle a dû l’éperonner et le cravacher... Ça ne lui ressemble pas.

- Elle m’a rendu visite, au logis. Nous avons ensuite déjeuné au « Bux’s Trucks ».

- Fichtre, pouffa Basile, vous ne lésinez pas !

- C’est elle qui a choisi !

- Cette fille renie ses origines !

- Offrez-vous le restaurant à toutes les personnes qui vous rendent visite, ça m’intéresse ! galéja Flora, en pianotant la table.

- Si le jeu en vaut la chandelle... Non, je plaisante : je voulais qu’elle me raconte ses hallucinations.

Les convives, vivement intéressés, articulèrent en chœur un :

- Et... Alors ?

Une voix joyeuse, depuis le seuil du café, chantonna :

- « Zorro est arrivé » !

 

Marie Bulu se décapuchonnait et déboutonnait un grand imperméable.

- J’ai une bonne nouvelle, dit-elle, le temps se lève, il y a même un petit carré de ciel bleu au-dessus de nous.

Ils se rapprochèrent les uns des autres pour faire une place à Mama et Basile alla remplir une tasse de chocolat en plaisantant :

- Vous savez vous pointer quand le travail est fini.

- C’est vrai. Désolée. Mais à compter de cette minute, je suis à votre disposition : Muguette est suffisamment en forme pour s’occuper des petits. D’ailleurs, Jaco est inscrit au concours...

Évariste soumit une idée :

- Vous pourriez remplacer Constance.

- Si vous voulez. Pas de problème. Est-elle malade ?

- C’est un peu ça...

- Malade du ciboulot ! grogna Évariste.

- Indiquez-moi seulement ce que j’aurais à faire. Que disiez-vous quand je vous ai interrompus ?

Flora regarda Mama au-dessus de ses lorgnons, avec une gravité d’Inquisiteur :

- Nous parlions des hallucinations d’Iseult de Touche, n’est-ce pas Polycarpe ?

Polycarpe trouvait gênant d’être sur la sellette, de divulguer des confidences et de nourrir une rumeur. Il était cependant curieux de recueillir quelques réactions. Il prit une pose détachée, une jambe par-dessus l’autre, en cramponnant sa botte.

- Elle a des visions d’une ancêtre assassinée au château...

Imogène l’interrompit :

- La fameuse Bramabante ! Je pensais que Pierre racontait cela pour épicer la visite de la « chambre rouge ».

- Probablement. Mais Iseult est formelle : elle la « voit » avec un poignard entre les omoplates. Elle a aussi l’impression d’avoir « vu » quelqu’un au logis qui étouffait Cornu avec un coussin.

- Non. Pas possible ! Qui ?

- Hum ! Je me méfie de ce genre de dénonciation, cette fille me paraît un peu dérangée.

 - Vous ne voulez pas nous donner un petit indice, la première lettre de son nom, par exemple ? implora Imogène.

- Non.

- Je vous approuve, dit Flora.

- Moi aussi.

- Vous avez raison.

- Elle est vraiment à l’ouest, cette nana ! décréta Basile, qui rapportait de ses écoles le jargon de la jeunesse.

Il posa un mazagran fumant devant Mama et reprit sa place contre Calamity avant de poursuivre :

- Non seulement personne, excepté Ulysse, ne pénétrait chez Cornu mais le jour où il est mort, il était tout seul. La moitié du village a vu Ulysse partir dans sa camionnette en début d’après-midi.

« Tout seul, sauf Petit Lu, le fantôme d’Iseult de Touche sous son plaid et Ulysse, peut-être » pensa Polycarpe, en épiant furtivement Évariste. Celui-ci avait l’attitude d’un passager en salle d’attente, qui regarde ses congénères d’un œil morne, les bras croisés, peu concerné par les histoires d’hallucinations. Il ne soupçonnait même pas que son fils ait pu avoir à faire avec Cornu pour un cambriolage et soit rentré à l’intérieur du logis. Il ne se préoccupait pas beaucoup de Petit Lu. Sans doute ne s’était-il même pas aperçu de l’absence de la moto.

Cette pensée l’assombrit subitement : il n’avait pas encore remis l’argent dérobé par Petit Lu à Chimène. Il avait repoussé cette corvée jusqu'à maintenant par pleutrerie mais il n’y couperait pas : il prit la résolution de s’en débarrasser dès aujourd’hui.

- Comment ça : « la moitié du village a vu partir Ulysse » ? demanda Mama. Moi, je n’ai rien remarqué !

- Tu n’étais pas dans la bonne moitié, moi non plus d’ailleurs, dit Calamity.

- Moi si, puisque je l’ai dépanné, dit Basile. Son combi n’avait plus de jus et je l’ai démarré avec ma bagnole en branchant des fils de batterie. Il partait chez des cousins à lui pour les vacances de la Toussaint.  Tu viens Calamity ?

Il informa les autres :

- On va à Cash  faire les courses pour demain, si vous pensez à quelque chose qui n’est pas sur la liste, c’est le moment.

Imogène ouvrit le chéquier de  l’alipa et signa un chèque à l’ordre de Cash.

- Nous vous ferons une délégation de signature pour l’avenir, tenez !

- Je m’en vais aussi, j’ai deux ou trois bricoles à faire, dit Polycarpe, en enfilant les manches de sa gabardine.

Imogène se leva :

- Je vous accompagne !

 

- Dites-moi, Polycarpe, puisque nous sommes entre nous...

Les ruses cousues de fil blanc d’Imogène - qui désirait ardemment savoir ce qu’Iseult lui avait confié au « Bux’s Trucks » - laissaient Polycarpe de marbre. Lui-même refusait de prêter foi aux allégations d’une psychopathe. Cependant, il combla en partie la curiosité de son amie en lui apprenant qu’Iseult vivait en concubinage avec l’un de ses psychiatres. Ce n’était pas trahir la jeune fille qui s’était flattée d’accompagner le spécialiste dans les dîners en ville.

Il eut une petite toux dubitative.

- Zückervit la croit guérie. Je le crois bien optimiste.

- Ou amoureux... Mais c’est elle qui se dit guérie... on n’a pas la version du fiancé. Comment avez-vous dit qu’il s’appelait... « Bite sucrée », c’est la traduction, n’est-ce pas ?

Polycarpe la foudroya du regard, à la fois indigné et résigné. Cette femme était incontrôlable. Au moment de la quitter devant sa boutique, une idée soudaine lui traversa l’esprit :

- Si vous aviez une heure à perdre, Imogène, je requerrais volontiers votre soutien dans une rude épreuve.

Elle lui fit face et pencha la tête avec un petit sourire méfiant, pour sonder sa sincérité. Polycarpe tripota le levier d’embrayage de son Solex et avoua, penaud :

- Je suis contraint et forcé de rencontrer Chimène...

Imogène éclata de rire.

- Je ne sais pas ce qui vous contraint, mais comptez sur moi ! Quand y allez-vous ?

- Après le déjeuner...

Elle déverrouilla sa porte qu’elle cala pour la maintenir grande ouverte maintenant que le soleil était revenu et elle s’apprêtait à retirer la petite pancarte : « En cas d’absence, s’adresser au café » quand elle se ravisa.

- C’est d’accord. Et  je laisse ce carton jusqu'à mon retour...

- Merci, Imogène, vous me sauvez la vie !

- J’ai une proposition à vous faire : mangeons un morceau ensemble avant d’aller chez Chimène. J’ai un reste de gratin d’aubergines, du jambon...

 - Je reconduis ma machine au hangar, je me déleste de ma gabardine et je rapporte une barquette de framboises menacées de moisissures dans mon frigo.

 

De chez lui, Polycarpe passa un coup de fil à Berouette, Chimène n’étant pas dans l’annuaire, pour annoncer sa visite.

- C’est à quel sujet ? s’enquit le cantonnier.

- J’ai récupéré l’argent volé. Soyons clairs, Berouette. Je pose comme condition de ne pas dévoiler l’identité de la personne, auteur du larcin. Elle se repent sincèrement et me charge de remettre l’argent à votre mère. Nous en resterons là, c’est d’accord ?

- On a pas le choix, si je comprends bien ?

Il avait le ton nasal et rancunier des insatisfaits.

- Pas vraiment.

 

Il chercha ensuite le numéro de la famille Côme, à Soutrain. Il n’avait nullement l’intention de rapporter directement à Ulysse les accusations d’Iseult, il était seulement curieux d’observer ses réactions concernant la jeune fille.

La personne qui décrocha avait la voix molle et distraite. C’était la mère de son pilleur de plans. Elle posa l’écouteur le temps de chercher son fils : des bruits de télévision et de batterie de casseroles lui parvinrent. En saisissant le combiné, Ulysse mastiquait encore.

- Ah, monsieur Houle ! Salut-ça va ?

Le jeune homme paraissait sans aucune arrière-pensée et ce tic de langage, dans de telles circonstances, parut plutôt sympathique.

- J’ai rencontré une de vos amies, vous savez. Elle vous cherchait. Elle ne savait pas que vous aviez vendu le logis. Je lui ai promis de vous contacter.

- Iseult, sans doute ? Je sais qu’elle me cherche. Comment la trouvez-vous ?

- Mon Dieu... Comme ci comme ça, c’est difficile de juger.

- Cette fille est folle et c’est incurable ! Je ne tiens pas renouer avec elle, je n’ai pas une vocation de saint-bernard.

- Elle désirait pourtant vous annoncer qu’elle est guérie.  Et ses fiançailles.

- Pas possible ! Ce type doit être ou rudement costaud ou suicidaire !

- Il s’agit de son psy, le Dr Zückervit...

- Parfait. Elle va enfin me lâcher la grappe ! Et vous, monsieur Houle, ça boume ?

Polycarpe sourit en lui assurant qu’en effet, ça boumait.

 
A suivre…
 
 
 
 

21:49 Écrit par Claudine | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |  Imprimer | |

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