23 septembre 2015
Dérivation illocutoire !
J’ai acheté La septième fonction du langage*, sur la foi d’une critique louangeuse de Busnel dans LGL, interpellée par le pitch titillant l’étudiante en linguistique que j’étais dans les années 70. J’ai ainsi stupidement dilapidé 22 € quand j’aurais pu, avec un peu de patience, satisfaire ma curiosité en dégotant ce bouquin chez un soldeur ou chez Emmaüs pour une bouchée de pain.
Ce texte pourrait se définir comme un exercice d’atelier d’écriture dont la contrainte résiderait dans la transformation de vrais intellos de l’époque en personnages de fiction, se vautrant dans le stupre et d’obscures spéculations linguistiques. Autre consigne : des phrases au présent, jetées comme des indications de scénario, en une succession de courts paragraphes : « Foucault débarque (…) Foucault demande des nouvelles(…) Foucault prend Derrida à part (…) Foucault dit qu’il n’aurait pas fait une chose pareille (…) »
L’astuce du siècle consiste à injecter au goutte-à-goutte un certain suspens ‒ absolument indispensable pour faire passer les bourratives digressions : un mystérieux document disparait, dont veulent s’emparer un espion bulgare avec son pébroque, deux moustachus à la Dupondt et les membres de la secte des coupeurs de doigts, le Logos club, où sont organisées des joutes verbales dont les perdants sont amputés !
L’auteur se marrait peut-être en échafaudant son petit scénario à la Tintin, mais la caricature et la dérision, ça va un moment ‒ dans une BD peut-être mais pas en littérature ‒ tout ça pour découvrir à la fin que si Mitterrand (ben, l’homme du secret, pardi !) a été élu en 81 et réélu, c’est qu’il était en possession du fameux document-mystère ! Et vous savez quoi ? Il s’agit de la septième fonction du langage, qui n’est autre que la technique de la manipulation verbale…
Je vous laisse digérer cette trouvaille.
J’avoue que j’ai failli abandonner la lecture de cette œuvre géniale sélectionnée pour le Goncourt, après cet extrait, page 439 : « Le sophiste au bec de médecin cale les couilles de Sollers entre les deux lames du sécateur, empoigne fermement les poignées, à deux mains, actionne le mouvement de cisaille. Et coupe.
Kristeva tressaille.
Sollers émet un bruit inconnu, un claquement de gorge suivi d’un long miaulement qui ricoche sur les toiles de maîtres et se répand dans toute la salle.
Le sophiste au bec de médecin ramasse les deux couilles et les dépose dans la seconde urne dont Simon et Bayard comprennent alors qu’elle a été prévue à cet effet.
Simon livide, demande à son voisin : « C’est pas un doigt, le tarif, normalement ? »
L’homme lui répond que c’est un doigt quand on défie un jouteur d’un rang juste au-dessus, mais Sollers a voulu brûler les étapes, il n’avait jamais participé à aucune joute et il a défié directement le Grand Protagoras. « Alors là, c’est plus cher. »
Je me dis que peut-être Binet envoie des messages subliminaux… que ça fait rire la rive gauche parisienne…
* « La septième fonction du langage » de Laurent Binet, Grasset.
15:32 Écrit par Claudine dans atelier d'écriture, Ce qui ne me plaît pas, discussion, langue, langage, littérature, Livre, publications, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
08 septembre 2015
l'expression "du coup"... ça continue !
Pour ceux qui suivent et commentent depuis près de 10 ans mon post révolté contre l’expression « du coup », un journaliste du « télégramme » m’a signalé une thèse norvégienne, de Katerine Malm, sur ce sujet, que je mets en lien ci-dessous.
Ce tic ou toc de langage atteint maintenant toutes les catégories socio-professionnelles.
C’est une facilité de langage, une rhinocérite à la Ionesco, que nous devrions essayer d’éradiquer.
“L’objet de ce mémoire est l’expression adverbiale du coup. Nous avons observé que même si cette expression est couramment utilisée, il est difficile de décider de son interprétation dans certains contextes, et par conséquent il est aussi difficile de décider de son utilisation. De plus, nous avons l’impression qu’elle n’est pas beaucoup décrite dans la littérature linguistique. Par cette étude, nous chercherons donc à en savoir plus sur l’expression du coup…”
La suite ici : http://munin.uit.no/handle/10037/3647
10:37 Écrit par Claudine dans discussion, idiomes, langages, sens des mots | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook | | Imprimer | |
01 septembre 2015
Rencontre de salons...
Les salons de livres se multiplient et fleurissent dans toutes les agglomérations, souvent au profit des politiques ou des organisateurs d’associations qui ont, jusqu’ici, pu profiter de l’indigence des écrivains et/ou de leur popularité pour se faire mousser, faire le buzz ou nourrir leur insatiable ego… En tout cas rarement par amour de la littérature, excepté quelques salons « historiques » crées avec les meilleures intentions mais qui, hélas, ont perdu leur innocence depuis belle lurette.
Ainsi me trouvai-je au salon de Montmorillon, dont l’égérie fut Régine Desforges (et sa bicyclette bleue qui trône à l’entrée de la ville), cité dédiée aux librairies et aux calligraphes. Douglas Kennedy m’a dédicacé son dernier livre en même temps qu’il était harcelé par une sorte de garde chiourme de sa maison d’édition qui le traitait omme un incapable majeur…
Bref. Entre deux averses peu propices à la vente de livres, j’ai vu arriver une sorte de Rouletabille trentenaire, Jules Armand Maleterre, armé d’une caméra qui faisait une vidéo sur ce salon et qui a eu l’heureuse initiative de m’interviewer…
Voici cette vidéo, en lien ci-dessous :
https://www.youtube.com/watch?v=o7LGbH4cIW4
Il aurait fait, m’a-t-il annoncé, une critique du « Crime de River House » dans une autre vidéo, que j’attends de visionner avant d’en faire, à mon tour, la critique, ici même, il n’y a pas de raison !
Et Dimanche, à la Forêt des Livres, j’ai vu revenir vers moi à nouveau Jules dont la caméra est équipée cette fois d’un manche télescopique, car il devient professionnel, le bougre, pour m’interviewer à nouveau.
J’attends l’interviewer au pied du mur…
10:19 Écrit par Claudine dans interviews, littérature, Livre, publications, salons et dédicaces | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |