20 février 2015
Les Petits Secrets de "POLYCARPE" (8)
"C’est un peu l’amanite que je mélange à la fricassée de cèpes pour que le poison passe inaperçu…"
Imaginez un gros poêle à bois, vous enfournez régulièrement des bûches qui s’enflamment au contact des braises, dans un foyer brûlant comme l’enfer, afin qu’il diffuse une bonne chaleur confortable. Eh bien, c’est ça, pour moi, écrire… Les colères qui brûlent en moi alimentent une œuvre paisible pour procurer un bon moment de lecture ‒ du moins est-ce l’objectif.
Ce qu’on ne soupçonne peut-être pas à la lecture des Polycarpe, c’est cette révolte, parfois la rage que les comportements injustes, indignes, les petits arrangements, les gros mensonges et la violence provoquent en moi et ont provoqué dans ma vie.
Derrière chaque volume il y a cette motivation colérique bien particulière, qui aiguillonne l’intrigue, mot après mot, page après page.
Ainsi, dans Le Vieux Logis, j’ai créé mon petit cénacle d’amis intelligents et anticonformistes, tant j’étais révoltée par la stupidité.
Le Pigeon noir dénonce les secrets de famille qui nous étouffent.
Le Nègre en chemise accuse l’imposture littéraire dont je ne suis pas la seule victime collatérale.
Le Nombre d’or met en scène des adultes irresponsables et coupables.
Le Crime de River House tisse le roman autour de la privation d’amour et de la cupidité, thème loin d’être épuisé et qui sous-tend également Cœur de Bœuf.
Dans le septième Polycarpe, les familles incestuelles seront sur le gril…
Évidemment, je brouille les pistes, j’inclus ces thèmes parmi d’autres dans mes récits, j’ai l’air de les utiliser pour faire diversion, alors qu’ils en constituent le socle.
C’est un peu l’amanite que je mélange à la fricassée de cèpes pour que le poison passe inaperçu… L’atmosphère cool des Polycarpe, c’est exactement l’antidote dont j’ai besoin pour contrecarrer le poison de mes colères, c’est pourquoi ne comptez pas sur moi pour écrire des romans vraiment noirs ou des polars saignants.
10:16 Écrit par Claudine dans les petits secrets de Polycarpe, littérature, Livre, roman policier | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook | | Imprimer | |
12 février 2015
" FLAUBERT ET LA SAINT-POLYCARPE"
Que penser de cette synchronicité, moi qui voue une passion à Flaubert ?
Note publiée par : L’Association des Amis de Flaubert et de Maupassant & la Librairie Élisabeth Brunet, coéditeurs.
" FLAUBERT ET LA SAINT-POLYCARPE"
Flaubert, dès 1853, s’est reconnu pour Patron intime le fulminant évêque de Smyrne. Il s’identifie tellement à lui qu’il en prend le nom pour signer ses lettres, Saint-Polycarpe ou Polycarpe tout court. Dans les deux dernières années de sa vie, Flaubert accumule les raisons de ne pas être « très gai »: ennuis d’argent, brouille avec le fidèle Laporte, complexité de Bouvard et Pécuchet. L’idée vient à ses amis proches de lui souhaiter la Saint-Polycarpe, avec faste et humour. Le premier dîner, qui eut lieu le 24 avril 1879, fut surtout riche en costumes et en décorations. La seconde fête, le 27 avril 1880, se distingue en revanche par la quantité de témoignages écrits reçus par l’invité, de la part des présents comme des absents. Flaubert raconte la soirée à sa nièce le 28 avril :
Je suis encore tout ahuri de la St-Polycarpe ! Les Lapierre se sont surpassés !!! J’ai reçu près de 30 lettres, envoyées de différentes parties du monde ! et trois télégrammes pendant le dîner. L’archevêque de Rouen, des cardinaux italiens, des vidangeurs, la corporation des frotteurs d’appartements, un marchand d’objets de sainteté, etc., m’ont adressé leurs hommages. (…) J’oubliais un menu composé de plats tous intitulés d’après mes œuvres.
Comme toutes les bonnes blagues, l’opération a été préparée avec minutie : Lapierre, directeur du Nouvelliste de Rouen, imprime différents papiers à l’effigie du saint, qu’il envoie aux participants. Et Flaubert, outre les lettres d’expéditeurs réels, reçoit d’ahurissants courriers. Car Maupassant, absent parce qu’il n’a pu se libérer de son ministère un jour de semaine et non pour cause de première communion, s’est multiplié en messages burlesques, dans une orthographe hautement fantaisiste, et sous des identités variées : le cochon de saint Antoine ; Pinard, l’ancien procureur de Madame Bovary ; Sarah Bernhardt qui s’offre en mariage ! ou Ménesclou, l’assassin d’une fillette. Il sollicite son ami Robert Pinchon, alias La Tôque, et inspire la missive d’un commerçant en objets pieux. C’est Maupassant enfin qui est très probablement à l’origine des télégrammes postés de Paris, à la sortie du bureau. Et Flaubert ne s’y trompe pas, qui a reconnu l’écriture sous les travestissements :
Véritablement, j’ai été touché de tout le mal qu’on avait pris pour me divertir.
Je soupçonne mon disciple d’avoir fortement coopéré à ces farces aimables ?
Il fallait bien toute la sollicitude de ses amis, toute la disponibilité de Lapierre et toute l’inventivité de Maupassant, ressuscitant les années du Garçon et son hôtel des farces, pour faire rire saint Polycarpe. Flaubert meurt subitement, onze jours plus tard, le 8 mai 1880."
12:13 Écrit par Claudine | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
De l’autre côté du miroir
Immergée dans la fiction profonde pour quelques mois, j’habite le vieux logis, j’ai retrouvé Polycarpe, Basile, Bérangère, Flora… et les autres ; je suis concentrée, c’est le début d’un long cheminement qui me conduira jusqu’à l’été.
12:07 Écrit par Claudine dans bizarreries, littérature, publications, roman policier | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |